T A B L E   R O N D E

 

 

 

« HABITAT PERMANENT »

 

9 juin 2015

 

 

V E R B A T I M

 

 

 

TABLE RONDE « HABITAT PERMANENT »

 

 

 

- La réunion débute à 9 heures 7 minutes.

 

 

 

M. Dermagne (PS). - Bonjour à toutes et tous. Merci de nous avoir rejoints ce matin pour cette première table ronde consacrée à l'habitat permanent, dans le cadre de ce qui constitue une première pour ce Parlement, à savoir une mission confiée par le Gouvernement wallon à trois parlementaires : M. Dodrimont, Mme Moucheron et moi-même, M. Dermagne.

 

C'est une première en droit parlementaire belge et wallon en particulier, mais sur le modèle de ce qui existe à l'Assemblée nationale française, à savoir : des missions confiées par un gouvernement ou par un ministre en particulier à un ou plusieurs parlementaires, avec pour objectif de déposer, à terme, un rapport qui embrasse l'ensemble de la problématique.

 

Cela a été un peu difficile à mettre en place puisque, s'agissant d'une première, ce n'est pas pour l'instant régi par le règlement d'ordre intérieur de ce Parlement. Nous avons donc dû travailler en marge du règlement, des us et coutumes, de la tradition du fonctionnement de ce Parlement. Cela n'a pas été facile à mettre en place en termes pratiques et logistiques.

 

Pour avoir la possibilité de pouvoir bénéficier de l'hospitalité et de la logistique de ce Parlement, il a fallu travailler en marge des règlements et obtenir l'aval de la Conférence des présidents et du Bureau ; ce qui a été fait. Cela a pris un peu de temps pour travailler également avec l'Inspection des finances. Il a fallu mettre tout le monde d'accord ; ce qui explique le démarrage un peu poussif de notre initiative et le fait que l'on se réunisse seulement aujourd'hui. On aurait voulu le faire plus tôt, mais cela a été rendu un peu difficile par ces problèmes de règlement et ces contraintes.

 

Un tout grand merci à vous d'avoir répondu favorablement à notre invitation. Nous sommes ravis de vous voir nombreux ce matin.

 

Nous avons la volonté de travailler aujourd'hui jusque midi, mais ce n'est pas un impératif, on peut déborder.

 

Je vous demanderais, puisque nos débats sont enregistrés, de bien vouloir vous présenter avant chacune de vos interventions pour le compte rendu. Cela facilitera les choses.

 

Je donne la parole à M. Dodrimont pour présenter le déroulement de la matinée.

 

M. Dodrimont (MR). - Bonjour à chacun d'entre vous. Avec Mme Moucheron et M. Dermagne, nous vous souhaitons la bienvenue. Nous sommes heureux de votre présence nombreuse et de pouvoir observer une présence très représentative de la problématique de l'habitat permanent.

 

On le sait : il existe une multitude de situations bien différentes quand on évoque l'habitat permanent.

 

Si on dit, en Wallonie, que 10 000 à 12 000 personnes vivent dans ces conditions d'habitat permanent, il y a, parmi ces personnes, des situations différentes avec des solutions différentes. Quand il y a des problèmes évoqués, il y a certes des solutions à trouver, mais ces solutions doivent être adaptées en fonction de chacune de ces situations.

 

Aujourd'hui, puisque nous avons présenté cette réunion comme un tour de table, comme un endroit où chacun allait pouvoir s'exprimer en évoquant son expérience, son vécu par rapport à la problématique, n'hésitez pas à spécifier, de façon très précise, ce que vous avez rencontré sur le terrain ; sachant qu'il y a des situations tellement différentes, tellement divergentes les unes des autres et qu'il convient de bien poser le problème pour aller dans la bonne direction. C'est déjà la nature même du plan Habitat permanent dans sa version actualisée, encore plus puisque l'on a listé toute une série d'actions qui correspondent également à des situations différentes.

 

Pour ma part, j'ai fait un petit constat et je le répète depuis quelques années maintenant : j'ai le sentiment – mais on peut toujours me prouver le contraire – que le plan Habitat permanent, même dans son actualisation, a aujourd'hui un peu atteint certaines de ses limites. Des actions sont en cours. Elles se poursuivront et contribueront à améliorer la situation de vie des gens, puisque c'est l'objectif principal du plan Habitat permanent. Cependant, on a le sentiment – je le vis dans ma commune fortement touchée par l'habitat permanent avec plus de 500 résidents permanents – que le plan Habitat permanent, tel qu'il existe aujourd'hui, ne correspond plus à un outil pour trouver des solutions aux différentes problématiques que vit ma commune.

 

La meilleure preuve, car ce n'est pas une équation avec de multiples inconnues, c'est qu'il y a même une légère augmentation du nombre de résidents permanents dans ma commune, malgré toutes les actions mises en place.

 

Depuis maintenant 12 à 13 ans, on travaille dans ce plan Habitat permanent et on a le sentiment d'atteindre une certaine forme de limite, du moins si l'on s'en tient aux statistiques pures et dures. Les chiffres peuvent être interprétés de façon divergente, mais le nombre d'habitants permanents est resté sensiblement le même depuis le début de l'opération, malgré toute une série d'actions menées.

 

Je pense que l'on peut entrer dans le détail assez rapidement. Notre souhait, dans un premier temps, c'était que chacun puisse se présenter et puisse également, dans cette présentation, évoquer son expérience personnelle par rapport à l'habitat permanent. En quelques mots, on peut dire ce pour quoi l'on œuvre dans cette problématique. Il serait intéressant de vous entendre tous.

 

Je vais confier le soin à Mme Moucheron de vous dire également quelques mots de bienvenue.

 

Mme Moucheron (cdH). - Bonjour à tous. Merci pour votre présence et votre disponibilité. Ce n'est pas toujours évident, selon les agendas, mais la matière mérite que l'on s'y attarde. Je vous remercie pour votre réponse positive.

 

M. Dermagne vous a expliqué le contexte de la mission. C'est la seule mission sur laquelle nous sommes plusieurs parlementaires. Les autres missions étaient dévolues à un seul parlementaire, mais vu le travail qui nous attend, on s'est dit que trois, ce n'était pas plus mal.

 

Nous sommes représentants de trois provinces différentes : je suis Hennuyère ; M. Dermagne vient du Namurois et M. Dodrimont de Liège. Je vois ici des représentants du Brabant wallon, c'est très bien, car l'intérêt est de voir les situations de manière la plus large possible et d'avoir une appréhension la plus concrète de ce qui existe sur le terrain.

 

Cette réunion, comme vient de vous l'expliquer M. Dodrimont, vise à faire un tour de table pour que vous vous présentiez, mais également que vous expliquiez la réalité de votre situation. Ce n'est pas une finalité. C'est le démarrage d'un travail de longue haleine. On s'est dit que la table ronde était la meilleure formule pour avoir la meilleure vision d'ensemble possible, que tout le monde se mettre autour de la table, mais ce n'est que le démarrage.

 

Si vous avez également des contributions écrites, certains d'entre vous l'ont déjà fait, n'hésitez pas à nous les donner. On reçoit vos documents, on y travaille. Si vous avez la volonté de nous voir dans d'autres endroits – certains ont sollicité des visites de terrain – on peut y répondre sans aucun problème. N'hésitez pas à nous solliciter ou à nous donner de la matière sous une autre forme que celle de cette matinée. Je sais que d'autres auraient voulu participer, mais n'ont pas eu l'occasion de se libérer.

 

D'avance, merci pour votre contribution à ce que notre mission soit une réussite. C'est ce que nous espérons.

 

M. Dodrimont (MR). - Merci, Madame Moucheron.

 

Nous allons commencer le tour de table. Je souhaite que chacun se présente. N'oubliez pas, à chaque fois, de répéter votre identité lorsque vous prenez la parole et de dire ce que représente le plan Habitat permanent pour chacun d'entre vous.

 

Nous avons aussi des représentants de la DiCS, Mmes Jansen et Daniel sont présentes, ainsi qu'une de leurs collègues. Je souhaite que l'on commence la présentation par vous, de manière telle à nous donner un petit focus sur la situation de l'habitat permanent de façon plus globale, puisque vous avez préparé quelques chiffres à nous donner.

 

Si je puis me permettre, Madame Jansen, de vous donner la parole en premier lieu. Nous continuerons ensuite le tour de table.

 

La parole est à Mme Jansen.

 

Mme Jansen, Directrice de la Direction interdépartementale de la Cohésion sociale. (DiCS) - Je vous remercie, Monsieur Dodrimont, ainsi que vos collègues, de nous avoir invités.

 

Notre mission est de coordonner, notamment, le plan Habitat permanent, d'en assurer l'accompagnement, le suivi et l'évaluation.

 

Pour ma part, je vous ai fait un petit historique de l'origine du plan et Myriam Daniel vous parlera plutôt de l'état des lieux de la situation actuelle.

 

Il y a d'abord eu une prise de connaissance du phénomène de l'habitat permanent à partir de 1992 en Wallonie, au travers des premières initiatives que l'on avait lancées et qui étaient les actions de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale qui sont les ancêtres des plans de cohésion sociale d'aujourd'hui.

 

On avait constaté que trois communes – Esneux, Estinnes et Somme-Leuze – avaient ciblé l'habitat permanent dans leurs actions. Un groupe de travail en est né afin de confronter les expériences. Un groupe de travail intercabinet a été composé en 1995, à la suite du dépôt du rapport général sur la pauvreté, pour travailler sur l'habitat permanent en Wallonie.

 

Ensuite, on a développé des expériences pilotes. Il y a eu la Cellule APIC – que vous connaissez bien, Monsieur Dodrimont – à partir de 1997 dans laquelle Mme Daniel a travaillé et qui était un laboratoire du plan HP. Sur une zone déterminée d'une dizaine de communes en Ourthe-Amblève qui rencontrait le phénomène de l'habitat permanent, on a développé une expérience pilote de miniplans HP, sans qu'ils n'en portent le nom, à l'époque, pour utiliser toutes les compétences de manière à apporter des solutions intégrées à cette problématique.

 

Il y a eu aussi, en 1999, un inventaire réalisé avec l'aide de la Fondation Roi Baudouin pour mesurer le phénomène de l'habitat permanent. Puis, dans le cadre de la Déclaration de politique régionale complémentaire, en 1999 également, des moyens supplémentaires ont été alloués à Estinnes, une des trois communes du début, pour requalifier le domaine de Pincemaille. 

 

Après cette phase d'expérimentation, il y a eu la volonté de développer un plan transversal qui soit piloté, à l'époque, par le ministre-président et, aujourd'hui, par le ministre de l'Action sociale. On a rassemblé toutes les parties prenantes, toutes les communes, les CPAS, les sociétés de logement de service public, tous les acteurs qui pouvaient être partie prenante, pour établir une concertation et élaborer un plan qui a été phasé en deux phases.

 

La première phase a été lancée en octobre 2003 avec 27 communes. La phase I, c'est ce qui cible les zones inondables et les campings. La phase II est entrée en vigueur le 25 janvier 2005 dans 24 communes qui étaient parfois les mêmes, parfois différentes. Là, on est hors zone inondable et on est hors camping.

 

On avait 33 communes au total et on a élaboré une première évaluation, en 2006, qui a été publiée et qui s'est principalement axée sur la qualité de la mise en œuvre du plan en termes de processus et d'actions, plutôt de dynamiques, mais n'avait pas le recul suffisant pour évaluer l'impact sur la population concernée. On a conclu, avec les communes, à la suite de cette évaluation, une nouvelle convention unique, phase I et phase II, jusqu'au 31 décembre 2009. Ensuite, une deuxième évaluation a été réalisée avec l'IWEPS qui analysait l'impact et formulait des propositions. Les conventions étaient reconduites jusque fin 2012.

 

Dans l'intervalle, il y a eu un nouveau gouvernement et la volonté d'actualiser le plan Habitat permanent sous la houlette, à l'époque, de la ministre de l'Action sociale, Mme Tillieux. Cinq groupes de travail cabinet/administration ont travaillé d'arrache-pied pour fournir des recommandations au Gouvernement wallon. Les 71 recommandations ont abouti au plan Habitat permanent actualisé tel que vous le connaissez aujourd'hui, approuvé par le Gouvernement wallon en février 2011 et organisé autour de cinq axes et d'actions suivies via un tableau de bord.

 

Les axes sont les suivants :

 

            maîtriser les entrées ;

 

            gérer ou transformer les équipements à vocation touristique ;

 

            reloger les résidents permanents dans un logement décent en zone d'habitat ;

 

            accompagner les résidents permanents ;

 

            organiser le partenariat ;

 

            piloter le plan Habitat permanent.

 

Une nouvelle convention a été conclue jusque fin 2013. On a voulu travailler de manière parallèle avec les plans de cohésion sociale qui se déroulent souvent dans les mêmes communes. Nous avons 29 communes inscrites dans la convention 2014-2019, la volonté étant aussi d'assurer une stabilité du dispositif et des aides dans la continuité pour les communes et les résidents permanents.

 

M. Dermagne (PS). - Merci, Madame Jansen.

 

La parole est à Mme Daniel.

 

Mme Daniel, Cellule méthodologie et évaluation (DiCS) - Je vais vous livrer quelques données chiffrées issues de l'état des lieux 2013. Chaque commune rentre annuellement un état des lieux. Ces états des lieux sont globalisés en un état des lieux synthétique qui est soumis au Gouvernement wallon.

 

L'état des lieux 2013 n'a pas encore été soumis au Gouvernement wallon. Je vous livre néanmoins quelques données qui en sont extraites.

 

Les données concernent les 27 communes qui ont répondu à l'état des lieux de 2013. Sur base de ces données, on peut dire que :

 

            la Province de Namur concentre 39 % des communes HP, ce qui représente 62 % des habitants permanents ;

 

            63 % des communes comptent moins de 250 résidents permanents, mais deux en comptent plus de 1 000 ;

 

            160 équipements sont concernés fin 2013 ;

 

            65 sont inscrits en phase II ;

 

            31 % sont inscrits en phase I ;

 

            et quelques équipements recouvrent les deux phases du dispositif ;

 

            63 % des équipements sont situés en zone de loisirs.

 

Les statuts des équipements sont diversifiés, mais on rencontre 29 % de parcs résidentiels, le week-end. Trois quarts des équipements comptent moins de 50 habitants permanents.

 

Au niveau du public HP, le plan Habitat permanent, au 31 décembre 2013, représentait 8 544 habitants permanents dont 8 248 domiciliés :

 

            65 % appartiennent à la tranche dite active, mais 29 % ont plus de 50 ans ;

 

            11 % sont des enfants de 0 à 12 ans.

 

Ces habitants permanents représentent :

 

            4 768 ménages dont 54 % sont des isolés et 22 % des couples sans enfants ;

 

            50 % sont installés depuis plus de cinq ans et 15 % depuis moins d'un an ;

 

            45 % sont propriétaires, 27 % sont locataires, 28 % sont propriétaires de la seule habitation, sachant qu'ils sont  locataires du sol.

 

 Sur l'année considérée, on a enregistré 1 569 nouvelles entrées et 1 345 sorties. Une diminution du phénomène HP est constatée en phase I, tandis que le phénomène est en progression dans les équipements de la phase II.

 

Au niveau du logement et de l'aide au relogement, 519 demandes de relogement ont été exprimées en 2013 dont 57 % ont abouti :

 

            50 % des ménages sont des isolés et un bon quart des familles ;

 

            77 % des relogements ont été effectués via le secteur privé et sur les années couvertes par le plan HP, de 2004 à       2013, 1 964 ménages ont été relogés.

 

Cela, ce sont les quelques données chiffrées.

 

Pour le surplus, M. Dodrimont m'avait demandé de brosser un rapide tableau de la diversité que l'on rencontre au sein des équipements HP.

 

Il est vrai qu'au-delà de la distinction classique qui est opérée entre les équipements de la phase I et la phase II, il faut savoir que le plan HP recouvre des réalités distinctes et différenciées. Je vais m'efforcer de vous les montrer.

 

La phase I, pour rappel, comme l'a dit Mme Jansen, concerne l'ensemble des campings, qu'ils soient situés ou non en zone inondable et tous les autres équipements situés en zone inondable.

 

Il faut savoir que l'appellation « camping » fait prioritairement référence à un mode de gestion identique de l'équipement, à savoir un exploitant propriétaire de l'ensemble du terrain qui loue des emplacements à la journée ou à l'année. Il choisit généralement qui il accepte ou non sur son terrain et fixe les règles d'application dans un règlement d'ordre intérieur qui est plus ou moins précis, selon les situations. Le bâti est, pour l'essentiel, composé de caravanes dont l'état est variable.

 

Sous l'angle de l'aménagement du territoire, la diversité est déjà de mise. Si la majorité des campings sont en zone de loisirs – parfois une combinaison de plusieurs zones essentielles de l'équipement se trouve en zone de loisirs – certains sont situés en zone d'habitat.

 

Au-delà de cette première différence, l'appellation recouvre des réalités différentes et se décline en quatre formes d'équipements :

 

            les campings touristiques qui sont labellisés et qui sont soumis au contrôle du CGT ;

 

            les terrains de caravanage qui sont aussi soumis à permis et au contrôle du CGT ;

 

            les campings non autorisés qui sont en cours de régularisation et qui sont suivis à ce titre par le CGT ;

 

            à côté de ces trois premières formes de camping, on a ce que l'on appelle les domaines qui, eux, sont sortis définitivement du secteur du tourisme et ne seront jamais régularisés.

 

Ces derniers sont problématiques, car comme aucun contrôle n'y est assuré, l'état des infrastructures laisse souvent à désirer, voire présentent une certaine dangerosité. Par ailleurs, ce sont les équipements dans lesquels les abus de la part de l'exploitant sont les plus fréquents : surfacturation de l'électricité, rétention du courrier, expulsion arbitraire, et cetera.

 

Quinze communes ont intégré, dans leur plan HP local, les équipements de ce type.

 

À côté de cette première catégorie qui concerne les campings au sens large, on a tous les autres équipements situés en zone inondable. Tous ont un peu commun : ils sont situés dans une zone d'aléas d'inondations élevés et la zone d'aléas couvre une superficie de plus de 80 % de l'équipement. Les inondations sont régulières et importantes dans certains de ces équipements. Dans d'autres, elles sont moins importantes et occasionnent, dès lors, moins de dégâts.

 

Pour le surplus, une première différence tient au statut de l'équipement. On trouve, dans cette classification, des parcs résidentiels de week-end, des rues à caractère de seconde résidence et un autre équipement. Cette catégorie vise des équipements sans statut particulier où les modes de fonctionnement interne sont souvent aléatoires et mal organisés.

 

Une seconde différence concerne l'aménagement du territoire avec le même constat que pour les campings : la majorité des équipements sont en zone de loisirs ; parfois, une combinaison de plusieurs zones ; et certains, comme pour les campings, sont en zone d'habitat.

 

Une troisième différence tient au bâti : mélange de caravanes, de caravanes emballées et de chalets. La qualité du bâti dans ces équipements est de moyenne à mauvaise. La qualité des infrastructures internes est souvent médiocre et le profil des habitants permanents est, pour l'essentiel, précarisé. Huit communes ont intégré, dans leur plan HP local, les équipements de cette catégorie.

 

À côté de ces équipements situés en phase 1, la phase 2 présente aussi une diversité remarquable. Pour rappel, la phase 2 intègre l'ensemble des équipements qui ne sont pas des campings et qui sont situés hors zone inondable. Hormis ce seul point commun, la diversité est au rendez-vous.

 

Dans la situation des équipements au plan de secteur, la zone de loisirs est majoritaire, mais certains équipements sont situés soit intégralement en zone d'habitat ou en zone forestière, en zone d'espace vert ou en zone agricole. Dans le profil des équipements, on trouve les parcs résidentiels de week-end, autorisés ou non, des villages de vacances, autorisés ou non, des rues à caractère de seconde résidence, des lotissements, des autres équipements et des abris de fortune.

 

Dans la superficie des équipements, ensuite, certains équipements ont une petite taille et le parcellaire y est dense. D'autres, au contraire, sont très étendus et les parcelles sont de grandes tailles.

 

Dans le mode de gestion interne des équipements, peu d'équipements sont régis par une véritable copropriété forcée. Dans la majorité des équipements, le fonctionnement s'apparente à une copropriété, mais n'en est pas une. Sans faire de généralité, la gestion interne est souvent déficiente, faute de professionnalisme des organes de gestion et de statuts corrects sur lesquels s'appuyer. Il en résulte des problèmes d'impayés – dans certains équipements les dettes d'eau et d'électricité sont importantes – et des conflits internes. Dans quelques équipements, l'ensemble du terrain appartient à un propriétaire unique qui loue les parcelles à l'année. On a peu, alors, le même mode de fonctionnement que dans les campings.

 

La diversité est aussi, là, au niveau des infrastructures internes aux équipements. Prévus initialement pour de la seconde résidence, les infrastructures sont le plus souvent insuffisantes pour supporter une utilisation permanente. Le fait qu'elles soient trop sollicitées occasionne des problèmes divers : surcharge électrique occasionnant des coupures, système de traitement des eaux usées prévu insuffisant, de sorte que le surplus des eaux usées est parfois rejeté dans la nature.

 

Ces infrastructures datent le plus souvent de la création des équipements et sont désormais vétustes ; ce qui génère aussi des soucis comme des fuites d'eau, différence de la cabine électrique, et cetera.

 

Il y a aussi une diversité dans la qualité du bâti. Dans certains équipements, l'habitat est très hétéroclite, le pire côtoie le meilleur. Dans d'autres, l'habitat est majoritairement de bonne qualité ou, au contraire, de piètre qualité. La taille de l'habitat est le plus souvent petite, limitée aux 60 mètres carrés prévus par le CWATUPE pour les parcs résidentiels. Cependant, quelques équipements du Namurois disposent de prescriptions urbanistiques dérogatoires autorisant des constructions de 150 mètres carrés. Dans certains de ces équipements, comme d'ailleurs dans certains lotissements, ce sont de véritables habitations en dur qui sont désormais construites.

 

Diversité encore dans le profil des habitants permanents. La situation de la plupart des équipements est mélangée, mais on trouve davantage un profil précarisé, voire très précarisé, parmi les locataires. Il y a un profil de ménage à revenus modestes ou moyens parmi les propriétaires occupants. Les beaux équipements attirent de plus en plus un public non précarisé qui profite de l'opportunité d'acquérir un grand terrain un peu moins cher qu'en zone d'habitat. Il y a 21 communes qui ont intégré, dans leur plan HP local, les équipements de cette catégorie.

 

    Une grande diversité de situations est présente au sein du plan. Ces diversités expliquent sans doute la raison pour laquelle il n'y a pas une solution, mais des solutions envisagées en combinant divers paramètres :

 

            l'aménagement du territoire ;

 

            l'état des infrastructures internes ;

 

            le coût que représenterait une remise en état ;

 

            l'état du bâti ;

 

            le profil des habitants permanents.

 

À cet égard, il convient de rappeler l'objectif premier du plan HP qui est de cibler les situations les plus précarisées en termes d'attention, de solutions à proposer et de moyens à affecter.

 

M. Dodrimont (MR). - Merci beaucoup, tant à Mme Jansen qu'à Mme Daniel, pour cette présentation. On a l'historique du plan Habitat permanent et on a aussi un état des lieux qui date, certes, de 2013, mais je pense qu'il est assez proche de la réalité, compte tenu des évolutions assez lentes que l'on évoquait tout à l'heure.

 

Après cette présentation intéressante, je souhaite vraiment que chacun puisse s'exprimer, réagir par rapport à ce qui a été exposé. Puisque l'on a listé toute une série de situations, si dans votre expérience propre, il y a un lien vers ces situations évoquées, il est bien de les exposer. De cette manière, on voit un peu la diversité des intervenants de ce jour.

 

Sans déterminer un ordre particulier, je propose que l'on parte de ce côté. Madame Mahy, vous seriez la première à nous faire une petite présentation, d'abord de qui vous êtes et de votre travail en lien avec l'habitat permanent, spécifiquement.

 

La parole est à Mme Mahy.

 

Mme Mahy, Secrétaire générale du Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté. - Je vais prendre la parole à partir du Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté.

 

M. Dodrimont, (MR). - Assez brièvement, puisque nous avons de nombreux intervenants, sans vouloir vous brider. Simplement votre expérience par rapport à l'habitat permanent et bien vous présenter avant, si vous le voulez bien.

 

Mme Mahy, Secrétaire générale du Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté. -  J'ai eu une expérience du travail de terrain en Province de Luxembourg, dans la région de Hotton-Durbuy, pendant plusieurs années. Il y a quelqu'un du Miroir Vagabond qui est là et qui pourra en parler.

 

C'est une expérience qui a amené, en tout cas, à la conclusion de la diversité des réalités qui viennent d'être énoncées par Mme Daniel, dans ses explications. Cela est clair. C'est aussi une expérience qui était en tension entre un dispositif qui vise à essayer d'améliorer les conditions des gens, en ne disposant pas nécessairement des moyens pour l'améliorer là où ils sont et en n'amenant pas nécessairement les gens à avoir les moyens de pouvoir améliorer leur existence ailleurs que là où ils sont. Si on déménage, il faut aussi que le portefeuille puisse suivre sur ce qui se passe après. Il y a ce que l'on vit dedans et il y a ce que l'on vit après, lorsque l'on n'est plus dans l'habitat permanent, pour ceux en tout cas qui l'ont quitté.

 

Je ne vais pas trop m'étendre sur le travail que j'ai fait, puisque d'autres vont parler d'un travail plus actualisé, mais simplement dire pourquoi le Réseau wallon est particulièrement préoccupé par la question depuis qu'il y travaille. On l'a dit et on l'a constaté : on sait qu'il y a un phénomène d'appauvrissement généralisé de l'ensemble de la population, que l'on habite dans l'habitat permanent ou pas, qu'il y a une difficulté d'accès au logement qui est absolument criante aujourd'hui en termes de logements publics ou de logements privés qui coûtent cher. On sait aussi que les gens cherchent à trouver des solutions. Certains trouvent des solutions dans le cadre de l'habitat permanent, sans parfois avoir le souhait d'arriver à cet endroit-là, mais y trouvant les conditions qui leur permettent de se poser dans la vie et d'arriver à assumer cela. D'autres en font clairement le choix et trouvent à s'assumer dans ce cadre-là. D'autres encore souhaitent le quitter.

 

La question de l'appauvrissement est loin d'être réglée, puisque tout le monde sait qu'un ensemble de mesures qui affectent les conditions de vie des gens aujourd'hui atteignent leur portefeuille. Cette crise du logement est loin de s'éteindre. Vous disiez tout à l'heure : « Il y a plus d'entrées que de sorties ». Effectivement, on connaît dans notre environnement proche, y compris des travailleurs, aujourd'hui, qui acquièrent des logements dans des parcs résidentiels, et cetera, parce que c'est la seule manière de pouvoir aujourd'hui, pour eux, accéder à la propriété. Là, je parle de travailleurs, je ne parle pas de gens qui sont allocataires sociaux ou au chômage.

 

C'est une réalité de la nécessité de réfléchir à l'accès à d'autres logements de type financièrement accessible, localisés à des endroits qui conviennent, et cetera. C'est l'une des raisons.

 

La deuxième chose, c'est que, au niveau du Réseau wallon de lutte contre la pauvreté, on a une démarche participative qui vise à mettre autour de la table les personnes concernées par les problèmes qu'ils rencontrent. Dans les groupes de travail que nous avons, au Réseau, nous avons des personnes qui habitent en habitat permanent, mais aussi des associations membres dont c'est une des actions. Ils ramènent cette question sur la table en lien avec la pauvreté, mais aussi en lien avec l'endroit, les espaces et comment sont entendus les habitants qui vivent dans ces lieux, qu'ils soient en phase 1 ou en phase 2, sur ce que sont leurs besoins à eux, comment ils les identifient, et cetera. Ils sont associés de façon participative.

 

En 2002, nous avions organisé une journée à Floreffe qui allait dans ce sens, avec rencontre des habitants. Nous avons régulièrement des réunions de ce type. Il y a en tout cas un souhait clair et explicite exprimé de la part d'associations et de personnes de dire : « Cela nous intéresse d'être associés au débat, au dialogue, d'être rencontrés, d'avoir aussi notre part à dire par rapport à cela ».

 

Le troisième élément est que l'on avait organisé, en 2012, avec le gouvernement précédent, une visite en Flandre avec des cabinets et administrations, pour aller voir les dispositions qui avaient été mises en place en Flandre sur « comment respecter les lieux d'habitat où se trouvent les gens dans le cadre de l'habitat permanent », tout en faisant évoluer le logement, et cetera. Si ces dispositifs ont leurs limites, ils ont au moins la qualité d'exister dans une démarche différente. Ce qui nous intéressait particulièrement, c'est qu'étaient prises largement en compte les capacités financières et les capacités en termes de mobilisation sociale des gens comme des critères déterminants pour faire évoluer la situation. Dans le dispositif, c'était extrêmement intéressant à nos yeux, même si on peut éventuellement trouver des failles à ces dispositifs. Cela mériterait, avec quelques années d'expérience, de s'interroger sur ces dispositifs.

 

En tout cas, la capacité financière et de mobilité sociale, ainsi que le désir de processus de mise en œuvre de mobilité sociale étaient centraux dans le dispositif. Cela me paraît essentiel.

 

Le dernier élément, pour aller assez vite, est que nous avons collaboré, pour une petite partie, à la dernière recherche qui avait été commandée par Mme la Ministre Tillieux à l'IWEPS et réalisée par l'ASBL RTA dans le cadre d'un comité d'accompagnement, mais aussi en étant facilitateur de rencontre d'habitants permanents pour réaliser cette recherche de personnes qui habitent dans ces infrastructures.

 

Le Réseau wallon, avec d'autres – il y en a parmi nous ici – a créé le Rassemblement wallon pour le droit à l'habitat, parce que l'on sait que le logement est central et que l'on pourrait décider demain que l'ensemble de l'équipe du Réseau wallon de lutte contre la pauvreté travaille exclusivement sur le logement en matière de lutte contre la pauvreté. Ce ne serait pas trop peu. On a trouvé utile de créer un Rassemblement wallon pour le droit à l'habitat qui consacre complètement son énergie à la question de l'accès au logement. À l'intérieur de ce Rassemblement wallon pour le droit à l'habitat, la question de l'habitat léger, donc de l'habitat permanent, vient sur la table également. D'autres, ici, pourront en parler. Je ne vais pas m'étendre sur ce point.

 

Le propos du Réseau wallon est vraiment de souhaiter et de désirer que toute évolution qu'il y aurait en matière de prise en compte de l'accès au logement et du maintien dans le logement de personnes tienne compte des désirs, des souhaits et des potentiels humains et financiers des populations. Il vaut mieux progresser avec des populations sur ce qui fait partie du cheminement qu'elles sont capables de faire, plutôt que d'aller en confrontation directe par rapport à l'ensemble des dispositifs.

 

Il nous semble que les questions critiques et cruciales se situent tout le temps au niveau de l'aménagement du territoire, au niveau des normes d'habitat. On sait d'ailleurs que ces normes liées à l'habitat ne touchent pas que les personnes qui vivent et qui habitent dans les infrastructures telles qu'elles ont été décrites auparavant. Je ne vais pas mélanger les problèmes, parce qu'ils sont différents, mais la question des gens du voyage et de la caravane fait aussi partie de ce questionnement-là. Je sépare les choses ici, parce que je sais qu'elles sont différentes pour les raisons qui font leur existence.

 

Voilà ce que je pourrais dire dans un premier tour. En tout cas, des rendez-vous seraient importants. Des rendez-vous qui auraient une dynamique de l'ordre de la participation de l'ensemble des acteurs, y compris des populations concernées, ce serait important également.

 

Je termine sur ceci. On est quand même dans une époque et une société où les populations ont de plus en plus l'impression d'être objets de décisions qui sont externes à elles, plutôt que des sujets pouvant participer à l'ensemble des décisions qui les concernent. C'est singulièrement vrai pour les populations particulièrement appauvries, puisqu'aujourd'hui, elles font l'objet d'une masse de dispositifs, de contrôles et de contraintes qui pèsent sur elles, comme si elles étaient problématiques, a priori. Or, il arrive fréquemment que le seul problème qu'elle vive soit le porte-feuille : un emploi qui ne paie plus assez, à mi-temps, morcelé, en intérim ou le chômage, les allocations sociales ou encore la pension qui n'est pas suffisante.

 

Il est parfois plus agréable de vivre dans un habitat léger et de pouvoir encore s'offrir le fait d'aller manger un boulet-frites le samedi ensemble, pour avoir des relations, dans une taverne du coin et avoir moins de frais de logement que de devoir consacrer l'entièreté de ce que l'on a au seul logement et donc être réduit à des objets qui règlent simplement la matérialité du quotidien, sans plus avoir d'aspiration qu'il est possible de réaliser.

 

M. Dodrimont (MR). - Merci, Madame Mahy, pour cet exposé. On avait évoqué tout à l'heure la diversité des situations de logement. Il y a aussi la diversité des personnes derrière ces logements, puisque comme vous l'avez bien dit, il y a certainement autant de situations différentes à devoir décliner, là aussi.

 

Vous avez aussi évoqué l'aménagement du territoire comme un secteur essentiel à aborder dans cette problématique. Je rappelle simplement que tant Mme Moucheron, M. Dermagne que moi-même sommes investis également dans la Commission de l'aménagement du territoire. On a déjà eu quelques réflexions en groupe de travail, puisque le CoDT, version avril 2014, est remis sur la table pour une discussion ouverte aussi sur ce sujet. Nous avons, tous les trois, tenu à faire état de notre attention à la problématique de l'habitat permanent. La résultante de travaux tels que ceux organisés aujourd'hui nous permettront aussi d'aller dans une direction liée à l'aménagement du territoire, lorsque l'on cherche des solutions.

 

Madame Mahy, vous avez évoqué le rôle de Miroir Vagabond par rapport à des expériences de terrain. On rebondit sur ce qui a été dit par Mme Mahy.

 

La parole est à Mme Brenez.

 

Mme Brenez, représentante de l'ASBL « Miroir Vagabond ». - Le Miroir Vagabond est agent de concertation sur les Communes de Durbuy et Hotton depuis le début du plan HP. Le travail qui avait été réalisé sur le terrain l'était bien avant le début du plan HP.

 

On est également reconnu comme association de promotion du logement. Dans ce cadre, on rencontre de nombreuses difficultés à trouver un logement pour certains ménages en fonction de leur situation financière et familiale. On se rend compte que certaines familles se tournent vers cette solution alternative au logement classique, soit par choix, soit par obligation.

 

Sur le travail de terrain, on a beaucoup travaillé sur la Commune de Durbuy : on a notamment accompagné une série de ménages qui avaient justement fait le choix d'habiter en habitat léger dans lequel ils ont développé des solutions pour l'électricité, pour l'eau. Tout à coup, ils doivent partir. On a été confronté à ce problème dont parlait Mme Mahy, concernant l'aménagement du territoire, parce qu'ils étaient à la fois dans le plan HP et à la fois en zone agricole. Il y avait toute la difficulté de devoir gérer les deux. Leur revendication était : « Nous voulons rester là, c'est notre choix de vie, n'y a-t-il pas moyen de trouver une zone spécifique à l'habitat que l'on a développé ? ».

 

Nous avons également vécu la fermeture d'un camping sur la Commune de Hotton. Là aussi, il y avait quelques personnes qui n'ont pas souhaité être logées dans l'habitat classique, qui ont souhaité rester en caravane, avec aussi parfois le risque de perdre une domiciliation. Pour eux, c'est capital.

 

En tant qu'APL, on fait parfois un suivi post-relogement. On se rend compte aussi que les personnes qui ont été relogées le sont parfois mal, parce que le logement classique n'est pas adapté à leur choix de vie. Parfois, quand il y a des projets où l'on demande l'avis des habitants permanents, où c'est créé en fonction de leurs choix, où c'est possible, alors leur relogement est positif. Cependant, on constate que certaines personnes retournent dans l'habitat permanent par choix.

 

M. Dodrimont (MR). – Merci beaucoup pour ce témoignage. Je voudrais rebondir sur ce que vous venez de dire. Il est important de respecter le choix de vie. On sait à quel point il est compliqué d'envisager des solutions de relogement.

 

C'est peut-être l'occasion de vous faire découvrir à tous un projet mis en place sur ma commune, grâce au Fonds wallon du logement. C'est le projet Spirale qui concerne 14 logements. C'est modeste. Ces logements ont été conçus avec l'aide des résidents permanents. On les a tous invités à une réflexion, à nous faire part de leur habitat tel qu'ils le rêvaient. Au départ, ils nous ont pris pour des farfelus quand on leur posait la question : « Qu'aimeriez-vous avoir ? ». Ils ont répondu : « Avoir un logement tel qu'on l'aurait imaginé. ».

 

Finalement, après moult péripéties, car ce ne sont pas des dossiers faciles, on a pu proposer à 14 familles d'intégrer un logement spécifique réalisé dans le respect des souhaits exprimés par ces personnes ; à savoir un lieu de vie qui n'est pas une grande place de centre urbain ou une maison sociale dans une cité. Ce n'est pas vers là que ces personnes souhaitent être orientées. On a créé ces 14 logements dans un lieu proche de lieux dits touristiques, avec un cadre de vie tel qu'ils l'avaient choisi, lorsqu'ils ont intégré un camping. Parfois, c'est par nécessité que l'on intègre ces équipements touristiques, mais c'est aussi par choix. Cela fait partie, comme Mme Mahy l'a dit, de la manière dont on va pouvoir vivre modestement, mais avec quelques aspirations liées à une vie sociale que l'on peut maintenir, car le coût du logement est moindre et que l'on vit dans un contexte de contacts. Il ne faut pas négliger cela, c'est important.

 

Il y a une vie sociale dans un camping que l'on ne connait pas ailleurs. Même dans une cité sociale, je pense que les personnes ne se parlent pas autant, ne s'entraident pas autant que dans ces lieux.

 

Il y a beaucoup d'expériences où l'on voit qu'il y a une ou deux voitures par camp et c'est la personne propriétaire de cette voiture qui aide les autres à aller à la pharmacie ou faire les courses, ainsi que toute une série de choses qui ne pourraient pas se faire sans la solidarité des uns et des autres.

 

Je vous remercie pour votre témoignage.

 

Au niveau du réseau, Madame Mahy, quelqu'un souhaite-t-il encore intervenir ? Tout a-t-il été dit ?

 

Mme Mahy. - Je sais juste qu'il y a un projet à Durbuy et Esneux, mais je ne sais pas où cela en est. Vous parliez du projet Spirale, mais je n'ai aucune idée d'où cela en est. Je ne sais pas si c'est dans le même esprit de la spirale. J'ajoute cela, car je pense que le Gouvernement n'est plus au courant, puisqu'il n'y a plus de concertation sur Durbuy. Il l'a donc été, mais ne l'est plus.

 

M. Dodrimont (MR). - Le projet Spirale est le fruit d'un travail commun entre le Fonds wallon du logement, opérateur principal, la commune qui a mis à disposition un terrain et la Province de Liège qui avait apporté une contribution financière afin que le projet ait lieu.

 

La parole est à Mme Ancion.

 

Mme Ancion, Inter-Environnement Wallonie. - Je suis Hélène Ancion d'Inter-Environnement Wallonie, ONG environnementale qui a essentiellement comme mission de travailler auprès des citoyens de façon à améliorer, si possible, les politiques publiques en Wallonie et au-delà, puisque nous avons des matières touchant au Fédéral et au niveau européen.

 

Personnellement, je travaille en aménagement du territoire. Le phénomène appelé HP a toujours été, pour moi, quelque chose qui avait sa place dans les discussions d'aménagement du territoire, à plus fortes raisons, car l'on disait que c'était l'aménagement du territoire qui avait dit que le plan HP était nécessaire. En effet, ces personnes vivaient dans des situations que l'aménagement du territoire réprouvait, sans expliquer plus avant. En explorant les documents au fur et à mesure, il s'est avéré que, tant dans le plan HP que dans d'autres écrits de la Région wallonne, il était difficile de discerner là où, précisément, on pouvait mettre le doigt sur une situation vraiment illégale ou contre réglementaire.

 

En fait, je me suis aussi aperçue que ce n'était pas juste moi qui m'y intéressais et qu'il y avait, chez IEW, une tradition d'intérêt pour ce sujet, même si au fil de nos conventions, cela n'était jamais mis à l'avant comme projet à suivre. C'est plutôt quelque chose qui nous a toujours tenus pour des raisons qui ont été matérialisées, comme M. Dodrimont l'a dit, au fil des événements. Cela a toujours été en lien avec les gens que nous nous sommes intéressés à cela. Pour nous, c'est une question qui touche au bon aménagement des lieux et ce bon aménagement des lieux n'est pas quelque chose qui vient simplement d'en haut, qui correspondrait à une définition, comme une peinture de Jean Dupont ou de Brueghel. Le bon aménagement des lieux ressort de la capacité de chacun à travailler à la fois à ce qu'est ce bon aménagement, dans l'esprit, mais ce qu'il est aussi dans le concret.

 

La capacité de faire évoluer ce bon aménagement des lieux, c'est précisément ce pour quoi Inter-Environnement est mandaté. C'est sans doute pour cela que nous avons notre place ici.

 

On a fait des petits positionnements. On a une position paper, comme on dit dans les milieux du lobby. Il a été transmis à nos trois parlementaires que je tiens à remercier de nous avoir invités. Il est disponible pour vous, si vous le souhaitez. Il y a également des articles en ligne, notamment un qui parle de cette récente recherche de RTA. Puis, à Durbuy, il y a ce fameux site, en zone agricole, qui avait été annoncé comme HP et, après, la DGO4, l'administration de l'aménagement du territoire, est venue dire aux gens qu'ils ne pouvaient plus se trouver là.

 

C'est un sujet vaste et extrêmement délicat. Oui, les gens trouvent des solutions par eux-mêmes. Il y a des solutions où le bouche à oreille fait que les gens se disent qu'ils sont en sécurité là, qu'ils sont plus cools ou qu'ils seront peut-être avec d'autres moyens pour se détendre. Cependant, je crois qu'il y a un prétexte souvent donné, pour mettre les gens dehors, qui est de dire que ce n'est pas bon pour l'environnement.

 

Je peux vous dire que je suis la seule représentante, ici, des associations environnementales. C'est en discussion aussi de manière sous-jacente chez nous, car il y a toujours des gens qui trouvent que c'est mauvais pour l'environnement. Personnellement, d'une part, je ne vois pas en quoi c'est plus mauvais que des habitations de type résidence secondaire qui sont là toute l'année sans occupant. D'autre part, je ne vois pas en quoi des gens qui seraient présents toute l'année, dans du logement relativement léger, causeraient davantage de mal à l'environnement que des voitures qui passeraient tout le temps à cet endroit, car on y aurait réalisé un circuit de sport.

 

Rien que pour différents types d'utilisation du sol, on pourrait commencer à envisager l'aspect environnemental. Je pense que, fondamentalement, quand les gens sont heureux – c'est là que l'autre aspect environnemental arrive –, car ils sont plus proches de la nature – dans un sens très concret – on peut s'interroger sur les capacités de notre logement social conçu de manière ordinaire à rendre les gens heureux avec, à la fois, un peu de distance avec les voisins qui renforce les contacts avec ceux-ci et la nature qui est tout autour de vous et pas seulement payable pour des gens qui auraient les moyens.

 

Les versions successives du plan nous ont posé des questions. On a notamment trouvé des paradoxes dans l'expression même du plan en 1972, 67 mesures, alors que, finalement, il y en a une qui dit qu'il faut reloger les gens.

 

Est-il encore nécessaire de faire 61 ou 71 autres mesures quand l'on a cet élément-là qui est mis quelque part dans le plan. Si c'est cela que l'on veut faire, si on veut faire déménager les gens, il faut alors le dire de manière très nette. Beaucoup de gens sont avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Ils ne savent pas. Si on ne leur dit pas où il y a 72 mesures, qui va les lire ? Eux ? D'autres gens les liront pour eux et le comprendront mal. Il faut se rendre compte que l'on met les citoyens dans une situation digne de la Grèce antique, avec cette épée de Damoclès.

 

Il y a une inadéquation entre les gens eux-mêmes et le site où ils sont. Je pense qu'ils risquent de créer davantage de difficultés, notamment familiales. Le fait que ce plan HP pende au-dessus des gens, cela renforce une situation parfois de préjudice, de situations où les familles sont montrées du doigt, notamment les enfants à l'école, alors que, fondamentalement, on voit que, par après, ils veulent retourner en caravane. Cela ne les a pas gênés, eux. C'est qu'ils étaient peut-être rendus honteux par d'autres.

 

Vraiment, je suis très curieuse d'entendre ce que toutes ces personnes ont à dire, aujourd'hui, parce que je vais pouvoir le rapporter chez nous.

 

M. Dermagne (PS). - Je vous remercie, Madame Ancion, pour votre intervention qui suscitera, j'en suis sûr, quelques réactions tout à l'heure. Nous pourrons y revenir dans un second tour de table.

 

Je propose que l'on continue les présentations.

 

La parole est à M. Praile pour l’ASBL Solidarité nouvelle.

 

M. Praile, ASBL Solidarité nouvelle. - Bonjour, je suis David Praile, pour l'ASBL Solidarité nouvelle. Je suis accompagné de Mme Jeannine Tips, Mme Sarah Foor et M. Lionel Wathelet.

 

Pour présenter rapidement l'association, elle est active auprès des habitants de zones de loisirs depuis une vingtaine d'années. Je ne vais pas être trop long, mais je vais resituer un peu l'historique. Elle a d'abord organisé, avec d'autres, une coordination des habitants à l'échelle régionale qui avait permis de rencontrer, en son temps, les cabinets et l'administration avec le soutien, à l'époque, de la DiCS. Je parle de 1999. Cela fait quelques années.

 

Elle a participé aussi à l'élaboration d'expériences pilotes qui sont un peu les ancêtres du projet Spirale, notamment à Brugelette, pour essayer de reloger les habitants en fonction de leur souhait. Jusque 2014, l'association était agent de concertation dans cinq communes, aussi bien dans le Hainaut, le Namurois que dans le Brabant wallon.

 

J'avais envie d'insister, d'abord, sur le fait que l'expérience, et ce qui a déjà été dit par certains montrent que, derrière les difficultés sociales, les manquements que l'on pointe, à travers le temps, c'est aussi une solution qui a été démontrée de la part des habitants. On le disait déjà en 1999, mais je pense que c'est encore plus vrai aujourd'hui.

 

L'apparition du plan HP, à l'époque – peut-être moins pour les habitants, mais pour quelques associations et acteurs impliqués – est apparue comme un mieux, puisqu'il y avait au moins quelque chose, alors qu'avant, il n'y avait rien, pas de ligne directrice claire au niveau du Gouvernement wallon. Maintenant, cela étant dit, l'évolution, au fil du temps, a montré – je serais un peu catégorique – plus que des limites. Je pense que l'on est, aujourd'hui, dans une forme d'impasse, très clairement, par rapport à cette situation. Nous n'avons pas manqué d'interpeller, plusieurs fois, le Gouvernement, les administrations, en particulier lors de la réforme en 2011 qui nous semblait comporter des risques importants d'aggravation de la situation pour les habitants.

 

Je voulais, sans être trop long, réagir à ce qui a été évoqué en termes d'état des infrastructures, de gestion difficile par les habitants. Il faut aussi remettre cet aspect dans la perspective que le plan et tous les dispositifs mis en œuvre empêchent toute amélioration concrète, sécurisée juridiquement, dans les sites. Il est difficile de reprocher, aujourd'hui, l'état des sites, car parmi les 67 mesures qui ont été citées, aucune ne permet d'améliorer concrètement la situation. Or, il y a une vraie demande, une vraie dynamique. J'étais content de vous entendre expliquer, Monsieur Dodrimont, que s'il y a une dynamique sociale intéressante, tout n'est pas rose – comme partout d'ailleurs – mais il y a une vraie demande pour améliorer son environnement, son habitat, qui est coincée, gelée dans l'œuf, actuellement.

 

Ce statu quo par rapport à la gestion, en particulier, est une difficulté à laquelle sont confrontés les habitants : ce sont les difficultés d'une cogestion. Comment le rencontrer dans une copropriété classique, même multipliée par l'espace, le territoire, toutes les complications qui sont liées et le fait qu'ils ont à assumer une responsabilité qui, normalement, est celle des pouvoirs publics ? C'est cela le point de départ.

 

On est donc dans un entre-deux sans réelle reconnaissance, aujourd'hui, ni possibilité légale d'investir, d'améliorer son environnement. Je considère, personnellement, pour être un observateur de longue date, que l'insécurité juridique que l'on déplorait avant le démarrage du plan s'est encore accentuée aujourd'hui. Les habitants savent encore moins à quoi s'en tenir, parce que les choses ont duré depuis trop longtemps et aussi parce qu'il y a beaucoup de mesures prises qui accentuent encore la pression.

 

Je voulais aussi relativiser : les chiffres parlent d'eux-mêmes en matière d'efficacité du relogement. Je pense que c'est assez clair au terme de toutes les années où cette perspective a été mise en priorité. Il faut aussi relativiser – on l'a déjà dit – la très faible efficacité qui ne doit pas cacher aussi l'absence de visibilité sur les suites. On a déjà rencontré, à plusieurs reprises, des habitants qui vivaient des situations bien plus graves après avoir été relogés. On n'a, finalement, absolument rien résolu. On a évoqué le retour en zone de loisirs. Dans le secteur privé, il y a des gens qui vivent des situations, après avoir quitté une caravane ou un chalet, bien plus catastrophiques.

 

Il me paraît intéressant, pour les suites, de relire aussi tout ce qui a été fait par le passé et d'insister sur la demande répétée des habitants, depuis l'origine, d’être entendus dans ce qu’ils vivent, mais aussi que leur solution d'habitat soit reconnue à part entière. Cette question-là est, pour moi, l'enjeu central, à l'avenir. Comme on le demandait déjà à l'époque, le temps ayant fait son œuvre – et c'est encore plus d'actualité – il est temps que l'on change de paradigme sur cette question. Ce n'est pas une formule, mais l'énergie et les moyens qui ont été déployés depuis plus de 15 ans montrent très clairement leurs limites. Pour le dire de manière un peu carrée, si l’on avait pu investir autant d'énergie et de moyens à améliorer les qualités de l'habitat, on ne serait sans doute pas là pour en parler. Il faut, de manière prioritaire et massive, aller dans cette direction-là, aujourd'hui, avec ces deux éléments : la reconnaissance de l'habitat – il y a plein de pistes et de travaux qui ont déjà été évoqués dans ce sens – et la reconnaissance de l'accès au sol.

 

Ce ne sont pas des questions simples. Je ne viens pas avec des réponses simplistes. Il y a plein d'enjeux qui y sont liés, mais il me semble que ce sont les perspectives à mettre vraiment en priorité.

 

Je voulais encore insister sur deux points.

 

D'abord, quand je parlais de changement de paradigme, il est aussi important de sortir de cette logique qui a prévalu jusqu'à présent et dans laquelle on a abordé la situation de l'habitant en zone de loisirs comme un problème, mais surtout comme un problème isolé de l'ensemble de la question du logement, en pensant que si l’on allait casser le thermomètre, la température allait chuter. Très sérieusement, toutes les mesures qui ont été prises l'ont été... Je pense, simplement, à titre d'exemple, à la maîtrise des entrées. On peut comprendre une volonté d'endiguer un phénomène, mais on sait que l'on ne va pas l'endiguer par des méthodes comme celles-là. Ce que l'on n’a pas cessé de dire depuis l'origine, c'est que, simplement, on risque que le souhait de s'installer et la capacité de s'installer quelque part ne se déplacent ailleurs, en créant d'autres problématiques et en créant aussi des dynamiques qui pouvaient être tout à fait défavorables à l'intérieur des sites. En effet, si les sites se vident de leurs habitants, ils meurent petit à petit, y compris ceux qui ont des perspectives réelles de viabilité.

 

La question de la transmission, de la reconnaissance du site et du bâti, est loin d'être une question simple, notamment sur les implications en termes de spéculation, par exemple. C'est quelque chose que l'on a très peu investi jusqu'à présent et sur lequel il faudra réfléchir. C'est une question centrale.

 

Sur les réformes, même si elles sont un peu à la marge, le fait que l'on ait inséré, dans le Code wallon de l'habitat durable, la notion d'habitation qui n'est pas un logement – la formule dit beaucoup de choses – cela ouvre la porte à une perspective de reconnaissance qui n'existait pas jusqu'à présent. On a encore utilisé le terme « abri de fortune » tout à l'heure. C'est assez révélateur par rapport à la difficulté de qualifier ce qui est bien un logement, même si ce n’est pas au sens réglementaire du terme. Surtout, j'invite à se saisir de ces ouvertures pour essayer d'aller de l'avant dans cette direction-là.

 

J'en terminerai avec la demande qui a déjà été formulée, mais je voudrais être plus explicite. Comme nous l'avons réalisée par le passé en 1999 avec l'aide de la DiCS, en 2009, à l'initiative du Réseau wallon de lutte contre la pauvreté – je ne cite pas toutes les initiatives – une rencontre la plus large possible entre les habitants et vous-mêmes, et puis d'autres acteurs, au besoin, me semble une étape tout à fait prioritaire. On a une expertise, on a plein de choses à raconter, mais chaque fois que l'on a pu faire cette démarche, cela a permis de voir les choses de manière très différente, parallèlement à des démarches de terrain, à une bonne connaissance comme acteurs impliqués localement. Cela permet, d'une part, que les habitants soient entendus et, d'autre part, d'avoir un autre regard sur la question. Cela me semble être une priorité.

 

M. Dodrimont (MR). - Merci, Monsieur Praile.

 

Peut-être une petite réaction avant de céder la parole à M. Dermagne qui interviendra suite à vos propos. Vous avez évoqué l'absence concrète par rapport à des situations qui pouvaient trouver solution et pour lesquelles le plan Habitat permanent n'a pas été la réponse. Je veux être un tout petit peu plus optimiste que vous pour dire qu'il y a des mesures qui permettent quand même la concrétisation de l'amélioration des conditions de vie ; ce qui est votre objectif et le mien, ainsi que celui de toutes les personnes qui sont ici présentes.

 

Je citerai l'exemple d'un parc résidentiel de vacances sur ma commune. Le travail a été de longue haleine grâce, d'ailleurs, aux différentes interventions de Mme Tillieux dans le cadre de ses compétences lors de la législature précédente. Pour ce parc résidentiel de vacances dont les habitations étaient dépourvues d'un raccordement à l'eau alimentaire, on est en train de concrétiser l'installation du réseau d'eau alimentaire dans le parc. La commune a accepté de reprendre les voiries, car c'était l'une des conditions émises pour que l'opération puisse se faire. Il y a 250 personnes qui vivent dans ce parc résidentiel.

 

Je n'ai jamais imaginé que la mesure 1 ou la mesure phare que l'on a évoquée, qui est celle de dire « Il faut reloger toute personne qui est en situation d'habitat permanent », était applicable vu la situation du logement social en Wallonie, vu toute une série de considérations et aussi le choix de vie des personnes qui sont, pour la plupart, toutes propriétaires en vivant dans ces lieux. Là, on arrive à une solution différente du relogement, mais qui est l'amélioration des conditions de vie.

 

Il faut que les pouvoirs publics prennent leurs responsabilités. Mes collègues m'ont suivi dans la proposition que j'ai pu leur faire, mais ce n'était évidemment pas un cadeau que de dire « On reprend 2,5 kilomètres de voiries, on va avoir des frais en plus pour les entretenir, on va devoir les remettre en ordre, on va devoir apporter des dispositifs bien meilleurs que les voiries telles qu'elles sont aujourd'hui. ». La commune a décidé de le faire et la Wallonie – ici, c'est la Société wallonne de distribution d'eau qui est quand même proche des pouvoirs publics wallons – a accepté de mettre le dispositif en place à ses frais.

 

On a dû trouver des mesures d'accompagnement pour que chaque personne puisse se raccorder, puisque vous le savez, un raccordement à l'eau alimentaire a un prix. Même si le fait d'être raccordé à l'eau alimentaire est une belle plus-value pour les personnes qui sont propriétaires d'une parcelle et d'une habitation, néanmoins, il fallait investir. Le paiement du raccordement a été étalé sur neuf mois avec une bonne collaboration la Société wallonne de distribution d'eau.

 

Au-delà de cela, le CPAS répond aussi à toute question individuelle quand il y a vraiment une problématique, puisque le réseau de distribution d'eau privé d'aujourd'hui va être, évidemment, désactivé dès le moment où le réseau public sera mis en place pour que personne ne puisse être privé de ce droit fondamental qui est l'accès à l'eau alimentaire. On a prévu des mesures d'accompagnement.

 

Cela a été rendu possible, malgré tout, par le plan Habitat permanent. En marge de cela, notre projet est toujours à l'étude, mais le ministre Prévot a lancé un appel à projets pour que, dans le cadre d'amélioration de ces infrastructures, dans les situations d'habitat permanent, il y ait aussi une aide aux communes pour, notamment, ici dans le cas qui nous occupe, la remise en ordre des voiries. Ce n'est peut-être pas spécifiquement inscrit dans le plan HP, mais il y a quand même toute une série de mesures qui peuvent être utilisées. Encore faut-il pouvoir mettre tout en place pour aboutir, car cela a été de longue haleine. Voici quand même, pour donner un petit peu d'optimisme au propos, ce qui a été concrétisé sur ma commune.

 

M. Dermagne (PS). - Merci, Monsieur Praile, pour votre intervention. Je voudrais peut-être vous rassurer et rassurer tout le monde : notre volonté est d'aller au contact des premiers acteurs, des premiers intéressés, de les rencontrer et de ne pas rester dans un travail académique. Ce n'est pas du tout notre volonté, ce n'est pas notre souhait. C'est prévu. Au-delà de visites de terrains classiques que l'on pourra faire ou que l'on fera, cette volonté est bien présente de rencontrer en direct les premiers acteurs.

 

J'aurais deux réflexions à formuler par rapport à ce que vous disiez et pour abonder dans votre sens par rapport aux problèmes de gestion. Un autre aspect, c'est le vieillissement d'une partie de la population et des gens qui s'investissent aujourd'hui dans la gestion quotidienne des domaines. Un représentant de la commune de Philippeville a fait récemment une pyramide des âges des conseils d'administration, principalement des ASBL dans cette commune, en disant qu'il n'y a pas de renouvellement dans les conseils d'administration, qu'il y a un vieillissement important de l'ensemble des acteurs et que, à terme, à cinq ou dix ans, il ne voit plus personne pour assurer la gestion quotidienne et poser des actes qui, comme vous l'avez dit, ailleurs, sont de la compétence des pouvoirs publics. C'est un problème important.

 

Deuxième élément, ils ne pouvaient pas être présents aujourd'hui, mais ils sont demandeurs de participer à la démarche, c'est la Commune de Hastière. On a déjà pu les rencontrer de manière individuelle. La Commune de Hastière, dans le cadre d'un appel à projets réalisé sous la précédente législature, est en train de finaliser un acte de base qui pourrait devenir, demain, un acte de base type – avec toutes les réserves que cela comporte – et qui pourrait être mis à disposition de l'ensemble des communes. Il devait être déposé par le notaire qui avait été désigné dans le cadre de l'appel à projets, fin du mois de mai, cela a pris un peu de retard. Ce sont ces aspects juridiques que l'on devra aborder sur la base de ce travail-là avec, bien entendu, les limites de l'exercice et les difficultés. Transposer ce qui a été fait pour une situation particulière à l'ensemble. La volonté de l'appel à projets, c'était de faire quelque chose de transposable.

 

Mme Moucheron (cdH). - Je veux revenir sur la question qui, pour moi, était essentielle. Je disais d'ailleurs à M. Dermagne être étonnée qu'elle ne vienne pas avant. C'est toute la reconnaissance de l'habitation. L'habitat permanent est un travail qui est lié aux compétences du ministre de l'Action sociale pour le moment, mais cela touche celui de l'Aménagement du territoire et aussi celui du Logement. Cela démontre toute la complexité du dossier dans lequel on s'engage aussi, mais c'est une question sur laquelle il faudra revenir.

 

Comme M. Dermagne l'a dit aussi, notre volonté est vraiment d'aller rencontrer un maximum de premiers concernés, c'est-à-dire les habitants, pour avoir la situation la plus claire possible et prendre les mesures les plus efficaces possible.

 

C'était un premier effort. M. Dodrimont l'a rappelé : les mesures ont été prises en 2011, elles ont permis d'avancer sur certains dossiers. J'entends aussi la remarque que si l'on avait mis autant d'énergie à aménager les sites, cela aurait peut-être été fait et, aujourd'hui, cette réunion n'aurait pas lieu être.

 

Par rapport à la qualité de l'environnement, j'ai entendu tout à l'heure : « La qualité de l'environnement, mais aussi si l'on installe un circuit automobile ». Ce n'est pas une question négligeable. On a parlé, tout à l'heure, des eaux usées. J'entends la démarche, mais je dois dire que c'est un point qui est particulièrement important aussi en matière d'habitat permanent.

 

M. Dermagne (PS). - On ne l'a pas dit à l'entame de nos travaux, mais le fait que l’on soit trois de régions différentes, de partis différents, est important. Nous sommes concernés par la matière et nous avons envie de nous y investir ou de continuer à nous y investir. Nous envisageons les choses sans tabou.

 

On sait que c'est une matière où les choses ont été abordées par le prisme, avec certains clichés et certains tabous aussi, notamment en matière d'aménagement du territoire. Il est vrai que la manière avec laquelle vous l'avez exposé tout à l'heure, Madame Ancion, par rapport aux conséquences pour l'environnement, à toute une série d'autres activités ou à la manière dont certains vivent l'habitat, c'était intéressant de l'entendre. Il faut le redire, parce que cela a été un des tabous réguliers dans le chef de l'aménagement du territoire, c'était de dire : « C'est contraire au bon aménagement des lieux. ». Ce n'est en tout cas pas notre vision des choses et on aborde la question, aujourd'hui, sans tabou.

 

La volonté est d'avoir un panel relativement large, sans représentant du Gouvernement – je tiens à le préciser – pour aborder les choses de manière libre, franche, à bâtons rompus et, je le répète, sans tabou.

 

On peut continuer le tour, je ne sais pas si vous voulez reprendre la parole maintenant ou après.

 

M. Wattiez, représentant du Réseau brabançon pour le Droit au Logement. - Depuis deux ans maintenant, nous travaillons en parallèle sur deux approches : d'une part, nous travaillons sur la question du logement public et, d'autre part, nous travaillons sur la notion d'habitat léger.

 

Nous avons voulu reprendre une notion développée depuis longtemps, en France, qui a déjà ses articles dans une loi, la loi ALUR, qui vient d'ailleurs d'avoir son décret le 27 avril.

 

Pourquoi reprendre ce nom-là ? En Angleterre ou aux États-Unis, on entend les tiny houses, qui est une manière de repenser la notion même d'habiter. On l'a prise parce qu'elle se développait chez nos voisins français. Nous sommes en contact avec eux sur cette question. Elle nous semblait être une notion objective qui parlait d'une solution et d'un art de vivre aussi. On l'a entendu dans pas mal de domaines. Des gens sont invités à déménager, reçoivent une prime, se retrouvent dans le privé ou dans le public, puis, par je ne sais quel phénomène, on les retrouve quelque temps après de nouveau dans les domaines.

 

Nous avons voulu, avec le RBDL, essayer de sortir cette notion et de l'objectiver, en travaillant sur l'arrêté du 30 août 2007 sur les questions de salubrité, en travaillant sur toute une approche culturelle et sociale, en mettant autour de la table autant les gens qui habitent dans des yourtes que dans des roulottes ou dans des maisons en terre-paille, dans une caravane ou dans un camion, toute une série de manières d'habiter, pour aller vers une demande qui a déjà été opérée au niveau du logement chez M. Furlan. Nous demanderions, en fin de compte, de développer un travail intersectoriel et interministériel qui mettrait autour de la table le logement, l'aménagement du territoire et l'action sociale.

 

Je ne vais pas rentrer dans tous les détails, les arguments et les définitions que nous mettons à l'œuvre, notre site RBDL.be est bien fourni. Je vous remettrai, par ailleurs, à la fin, une note que vous avez peut-être déjà reçue en version digitale, mais je vous ai préparé un petit dossier dans lequel vous trouverez un résumé, les actes de la matinée qui ont eu lieu en décembre à Louvain-la-Neuve, ainsi que le mémorandum de l'habitat léger produit par les habitants de l'alternatif et des domaines ou campings.

 

M. Dermagne (PS). - La parole est à M. Lardinois.

 

M. Lardinois, représentant du mouvement Luttes Solidarités Travail. - Nous aussi, nous sommes sur le terrain auprès des habitants qui vivent dans les domaines et les campings depuis l'année 1996. C'était notamment dans la Commune de Noiseux, à l'époque, où l'on a essayé de mener un mouvement de résistance avec les habitants par rapport au projet de gentrification du bourgmestre.

 

On a mené des actions pour faire remettre l'eau après des coupures, on a travaillé avec les habitants à réfléchir comment on peut se mettre ensemble pour faire face à des travaux, parce qu'il y avait d'énormes fuites et des installations électriques insalubres. Déjà là, on a été confronté aux problèmes d'aménagement du territoire, à l'insécurité juridique des habitants. La pression était telle qu'il ne fallait pas menacer les gens de partir. Souvent, ils s'en allaient d'eux-mêmes, parce qu'il était insupportable de vivre ainsi.

 

Par la suite, on a mené un travail sur la Commune d'Onhaye, dans les domaines « Mayeur François », et maintenant « Mia Flower » où je suis agent de concertation depuis maintenant 10 ans. On peut dire que cela a permis de mettre autour de la table les autorités communales et les habitants et que les autorités communales ont pu entendre que les habitants avaient envie de rester là. S'en est suivi une série de travaux, de nouveau, suite à l'insalubrité du circuit électrique et suite aux fuites d'eau énormes.

 

Comme on le disait tout à l'heure, il n'a pas été simple de trouver des finances, dans la mesure où l'on n'avait pas l'appellation « zone d'habitat ». C'est une question qui reste en suspens.

 

J'ai envie de dire aussi, pour rejoindre Mme Jansen, quand elle disait tout à l'heure que la sortie du plan HP a été le fruit d'une concertation. Notre souhait, dans le mouvement LST, est de remettre en route une concertation des différents acteurs, une concertation permanente et un lieu où l'on puisse en parler. J'appuie aussi la demande, dans le cadre de votre mission, de donner une large part de parole aux plus pauvres et aux gens qui habitent dans ces lieux.

 

M. Dermagne (PS). - La parole est à M. Bodart

 

M. Bodart, représentant du MOC de la Province de Namur. - Nous sommes les champions de l'habitat permanent. Je voudrais rassurer, parce que beaucoup de choses ont été dites. M. Dodrimont disait tout à l'heure : « Je fais du bien à mes habitants permanents ». Ce que je voudrais savoir, c'est s'il a dans l'idée une reconversion en zone d'habitat ou pas. Vous me répondrez après.

 

Comme on a dit beaucoup de choses là-dessus et que je ne voudrais pas en remettre une couche, je partage l'avis de mes confrères et consœurs par rapport à tout ce qui a été dit. Je voudrais savoir si la concertation en tant que telle – on est tous agents de concertation quelque part – a été rendue un peu caduque, puisque maintenant, ce sont les communes qui décident si, oui ou non, on continue la concertation. Je trouve que c'est un recul. Rend-on ces concertations obligatoires ou pas ?

 

Je pense que c'est un garant en termes d'objectivité, puisque ce sont les associations en général qui sont dans ces organismes de concertation. Il faudra faire quelque chose à ce niveau.

 

Le MOC a sorti une note, vous l'avez tous eue, vous avez entendu ce que l'on avait à dire, je ne vais donc pas revenir là-dessus non plus. En termes juridiques, quelles sont vos options pour améliorer la situation et, surtout, rassurer les gens par rapport à l'insécurité dans laquelle ils se trouvent ?

 

C'est court, c'est clair.

 

M. Dermagne (PS). - C'est direct, mais c'est très bien.

 

Comme je viens de le dire, on envisage les choses sans tabou, notamment en matière d'aménagement du territoire, en reconversion en zones d'habitat. Comme M. Dodrimont l'a dit, on a participé tous les trois – on continue à être forts actifs – au groupe de travail sur la modification du CoDT qui a clôturé ses travaux, il y a un mois. Cela a été un travail à marche forcée pendant un mois et demi. C'est un des points que l'on a, tous les trois, mis à l'ordre du jour de la commission en disant que l'on voulait absolument que l'on puisse travailler sur cette question, à la fois sur la reconversion en zones d'habitat, mais aussi sur la possibilité d'utiliser d'autres dispositifs pour financer les améliorations ou les reconversions de domaine ou de zone de loisir HP. On avait notamment pensé à l'utilisation de la procédure SAR – site à réhabiliter – pour laquelle il existe des moyens insuffisants, mais qui sont relativement importants et qui sont plus importants que ceux dédiés au plan HP.

 

Ce sont des éléments qui sont, aujourd'hui, sur la table. On attend un retour de la part du Gouvernement. On attend le retour du Conseil d'État sur le texte. Néanmoins, ce sont des éléments sur lesquels on continuera à se battre. Je le dis indépendamment du fait que l'on soit dans l'opposition ou dans la majorité. C'est quelque chose qui, pour nous, nous semble prioritaire. On l'a dit en groupe de travail ; il n'y a pas de secret. On a été très clair par rapport à cela. On verra comment le Gouvernement peut intégrer cela, mais c'est quelque chose que l'on ne lâchera pas. On verra si on sera suivis par nos collègues.

 

M. Dodrimont (MR). - Je voudrais dire un petit complément par rapport à la problématique de la reconversion sur le plan planologique, puisque c'est de cela dont il est question. C'est important, mais ce n'était pas fondamental. Je crois que la première action que l'on a menée, c'est améliorer la qualité de vie des personnes. Oui, je suis attaché. Dès le moment où les pouvoirs publics font les efforts pour que les infrastructures soient améliorées, on parle d'équipement de voirie, d'éclairage public qui améliore la sécurité ; bref, tout ce qui, en principe, est à charge d'une commune ou d'un pouvoir quand il se soucie de la qualité de vie des gens.

 

L'aspect planologique, c'est important. Cela doit venir dans un second temps, en ayant bien en tête que cela peut – il faut être prudent – susciter quelques velléités spéculatives quand l'on transforme une zone.

 

Je suis attaché à ce que l'on en parle et qu'il n'y ait pas de tabou par rapport à cela. Dans les cas que je connais – je ne vais pas en parler tout le temps, mais on est plus à l'aise de parler de ce que l'on connaît sur le terrain – c'est important pour les personnes qui ont investi dans ces lieux, qui ont parfois une petite propriété constituant leur seul bien. Ils ont envie de le léguer à leurs enfants. Ils ont envie d'être des propriétaires à part entière.

 

Aujourd'hui, le sont-ils vraiment, vu l'insécurité juridique qui entoure leur situation ? Je ne le pense pas. Souvent, ces gens, quand ils me voient en ma qualité de bourgmestre, se disent « Nous sommes des sous-citoyens de la Commune d'Aywaille ». Il faut briser ce discours, mais il existe et il reste, car ils se demandent « Quand sera-t-on enfin des citoyens à part entière ? ».

 

Cela passe par le transfert de ce qui est, aujourd'hui, un bien soumis à copropriété vers la commune, pour parler-vrai. Cela passe également par une sécurisation de la situation sur le plan planologique où, aujourd'hui, en zone de loisir, il est extrêmement difficile d'obtenir un prêt. Quand les gens veulent améliorer leur bien et qu'ils consultent une banque – on connait aujourd'hui toute la frilosité des banques quand on leur demande un peu d'argent pour améliorer le quotidien – en disant : « Je voudrais faire une pièce de vie de plus, car on attend un enfant supplémentaire ou tout simplement améliorer notre situation ». La banque demande où ils habitent et ils lui répondent qu'ils habitent dans un parc résidentiel de vacances. Le mot est déjà de trop. La banque a vite fait de refermer le dossier.

 

Je ne caricature pas trop ici. Je vous assure que c'est vraiment le cas. Je signe des attestations – peut-être que mon collègue le fait aussi – qui disent que c'est un lieu de vie tout à fait habituel. En effet, 250 personnes y vivent. On peut y développer un projet de vie. Un permis peut être accordé. Bref, on essaie de normaliser une situation qui est marginale.

 

Je suis attaché à ce que l'on ait une réflexion là-dessus, tout en étant attentif à ce que ce soient les personnes qui y vivent aujourd'hui qui bénéficient de la mesure et que leur bien connaisse une valorisation parce que le plan de secteur change. Si ce sont eux qui en bénéficient, moi, cela ne me fait pas de douleur par rapport à cela. Je serais très heureux que ces personnes qui sont souvent... Je prends l'expression d'un ami, Ariste Wouters, malheureusement décédé, qui a beaucoup travaillé dans l'habitat permanent et qui a souvent été un peu visionnaire. Il disait : « Ce sont tous des cabossés de la vie ». Si on peut leur apporter une petite aide par rapport à une plus-value de leur bien, où est le souci ?

 

Pour moi, il est important que, juridiquement, on stabilise leur situation, on arrive à régulariser quelque chose qui, aujourd'hui, est marginal, mais en étant attentif à ce que l'on n'ait pas, du jour au lendemain, des hectares de zone de loisir qui passent en zone d'habitat. Par ici la bonne soupe pour un promoteur immobilier ! Cela me gênerait profondément, je ne le cache pas.

 

Pour des situations bien spécifiques comme celles que j'évoque, qu'il y ait un passage vers une zone d'habitat pour ces zones de loisir, dans ces cas-là, je n'ai aucun mal à ce que l'on y travaille. Cela va dans le sens de mes différentes propositions. La réflexion est ouverte, comme M. Dermagne l'a rappelé.

 

Mme Moucheron (cdH). - Je voudrais ajouter quelques mots pour vous rappeler le but du travail. Le ministre, qui a la responsabilité du HP pour le moment, a vraiment la volonté de trouver les solutions les plus efficaces possible en matière de sécurité, d'amélioration, d'aménagement du territoire.

 

Notre travail sera transversal. C'est pour cela aussi que l'on a été désigné en début de mandature – c'est vrai que l'on a pris des délais et M. Dermagne vous l'a un peu expliqué – parce que l'on a aussi notre travail, par ailleurs, sur le CoDT. La volonté est vraiment d'aboutir à quelque chose qui soit le plus concerté et le plus sécurisé, que ce soit en matière juridique, mais aussi contre la spéculation. Ce sont des problèmes sur lesquels il ne faudrait pas avancer trop vite pour se retrouver dans des situations où, finalement, les gens sont poussés un peu plus loin.

 

La volonté, ici, c'est de prendre le temps de rencontrer un maximum de personnes et de proposer quelque chose acceptable et efficace pour tous.

 

M. Dermagne (PS). - Et qui ne sera pas monolithique, puisque les situations sont différentes au sein d'une commune, d'un domaine, d'une zone de loisir. On l'a évoqué, il y a des villas de 150 mètres carrés ; à Philippeville, à Couvin ou à Noiseux aussi, il y a des situations différentes qui appellent des solutions différentes et pragmatiques.

 

M. Toussaint, MOC Brabant wallon. - Je signale que nous sommes fortement partie prenante du RBDL – Réseau brabançon pour le droit au logement – et que ce que j'ai entendu et ce que j'ai à dire correspond. Ici, sur le côté spéculatif, c'est effectivement une question essentielle. Cet élément essentiel est lié à une diversité.

 

Il est vrai que, en Brabant wallon, on est bien placé pour savoir que, si vous êtes propriétaire de terres agricoles qui, tout à coup, demain, passent en zones d'habitat, c'est le jackpot. Cela, c'est autorisé. Malheureusement, je dirais. C'est peut-être un autre travail à faire au niveau de la Région wallonne.

 

Par contre, par rapport à l'habitat léger que l'on a amené tantôt, je pense qu'il est essentiel. C'est une question qui rejoint des logiques environnementales, par exemple écologiques, qui ne sont pas liées à des grands dispositifs. J'entendais parler tout à l’heure de raccorder l'eau aux différentes habitations. C'est un coût et une plus-value. On entre alors dans la logique du marché dont il faudrait se prémunir. Quand on parle d'habitats légers, on parle d'habitats qui ne doivent pas nécessairement être reliés à toutes ces formes d'investissements, qui ont en plus un coût écologique bien moindre que les habitations normales. Là, on change un peu le paradigme ou le regard, puisque ce sont les habitants de l'habitat léger qui regardent les autres habitants en leur disant : « Finalement, vous êtes beaucoup plus pollueurs que nous et c'est nous qui sommes stigmatisés. ».

 

Il y a ce droit à l'autoréalisation des personnes qui rentrent dans des choix de vie où elles ne se lient pas avec les banques – on en parlait aussi pour le rachat d'une pièce. Ici, c'est plutôt le choix d'habiter dans une petite habitation que l'on construit soi-même, qui donne une certaine indépendance. Ce choix rentre aussi dans cette dynamique de crise du logement. Au niveau de l'habitat permanent, c'est une manière de voir les choses qui a été stigmatisante pour une série d'habitants. S'il y avait bien une urgence à faire, c'est sortir de l'insécurité dans laquelle les habitants sont, parce que c'est quelque chose de constant. Il y a un flou. L'espèce de flou qui règne au niveau politique, non seulement développe une grande insécurité au niveau des habitants, mais risque aussi de générer, à un moment donné, des réponses politiques qui ne sont pas souhaitables, si vous voyez ce que je veux dire.

 

Je pense qu'il faut vraiment être attentif à cela, il y a une certaine forme de méfiance supplémentaire dans le politique à partir du moment où les solutions tardent à venir, que l'insécurité croît et que le sentiment d'injustice croît en même temps.

 

Je souhaiterais parler aussi d'un changement culturel assez essentiel, c'est que quand on a travaillé, au niveau du RBDL, on voulait faire des assises du logement, parce qu’en Brabant wallon et en périphérie bruxelloise, la crise est très prégnante. Ce que l'on a comme difficulté, c'est que les personnes qui habitent le Brabant wallon sont souvent amenées à quitter celui-ci pour peut-être aller s'installer à Hastière ou ailleurs. Bref, ils vont nettement plus loin, parce que, simplement, ce n'est plus tenable pour eux.

 

Je voudrais aussi rappeler que l’on aurait tendance à penser que la précarité dans le logement est liée au plan HP, mais ce n’est pas le cas du tout. Derrière certaines belles façades, un peu déglinguées tout de même, à Waterloo, il y a beaucoup de misères auxquelles on ne croit pas. Si l’on veut regarder une échelle de socialité ou de sociabilité entre le camping dont on parlait tout à l'heure en disant qu'il était bien développé – je rejoins cet élément, cette perception me paraît juste – je pense que l'on pourra, après mettre, le logement social où il y a aussi une logique d'entraide plus importante, reste que les clos – là où l'on ne se voit pas, où l'on ne se côtoie pas, on part le matin et on revient le soir – sont sans doute les lieux où la socialité est la moins développée. À un moment donné, c'est peut-être bien une question qui, politiquement, est interpellante sur le vivre ensemble. Peut-être que les plans de cohésion sociale devraient être réorientés.

 

La question de ce changement culturel est essentielle, parce que c'est une logique autre. Là, les personnes se prennent en charge et ne comprennent pas que lorsqu'elles se prennent en charge, qu'elles améliorent leur logement, qu'elles construisent du logement léger, qu'elles ont un souci écologique, elles ne soient pas aidées par les pouvoirs publics, voire qu’elles doivent les craindre. La question est importante, autant pour les gens qui sont dans des domaines que pour les gens qui sont dans l'habitat léger. En tout cas, une chose est sûre : pour nous, en Brabant wallon où le logement est de plus en plus cher et soumis à la spéculation de manière extrême – comme dans certaines parties de la périphérie liégeoise ou dans les autres gros centres – la réponse à la crise du logement passe, notamment, par l'habitat léger, par l'habitat social. Nous sommes aussi des recordmen du moins de logements sociaux, en Brabant wallon.

 

Ces différentes réponses doivent être liées à une chose qui est essentielle pour les personnes : la possibilité de choisir. C'est quelque chose qui est essentiel. La violence sociale qui a été ressentie et ce que l'on en entendait, c'était que les personnes qui étaient dans cette situation avaient l'impression que soit elles avaient fait un choix, soit des situations familiales les avaient amenées – des cabossés de la vie – vers cette situation, mais ils s'étaient construits au départ de là. Toute cette construction, tout ce processus n'était pas reconnu par les pouvoirs publics ; ce qui était assez paradoxal. En effet, finalement, ce sont les gens qui se sont le plus battus pour s'en sortir, qui se sont pris en main. Alors que l'on valorise en général l'entrepreneuriat, ces entrepreneurs de leur vie n'étaient pas reconnus dans leur réalité.

 

Mme Moucheron (cdH). - Merci, Monsieur Toussaint.

 

Quelqu'un a-t-il envie de réagir ?

 

La parole est à Mme Tips.

 

Mme Tips, Solidarité nouvelle. - Tout à l'heure, j'ai passé mon tour. J'ai été agent de consultation. C'est tout un débat sur la raison pour laquelle je ne le suis plus. Dans la nouvelle convention de 2014-2019, il est indiqué que les communes, pour la phase 1 « Campings et zones inondables », doivent faire un plan ou devenir zone touristique, ou assainir. Ce plan devrait être fait dans la convention pour la phase 1, fin 2014, et pour la phase 2, dans le courant de 2015. La question est la suivante : comment faire, pendant que l'on discute sur la légalisation, avec cette convention ? Les communes vont-elles faire leur plan ? Elles ne l'ont pas fait jusqu'à présent. Qu'en est-il de cette convention ? C'est un point très important avec ce que l'on a dit sur les infrastructures. Dans la nouvelle convention – ce n’est pas nouveau, mais c'est revenu – on trouve l'interdiction de nouvelles entrées.

 

Les habitants que vous aurez l'occasion de rencontrer, en copropriété, sont absolument contre cela, parce que s'il n'y a pas de nouvelles entrées, il y a des gens qui partent et les frais de l'infrastructure deviennent beaucoup plus importants pour ceux qui restent. En plus, il y a des parcs où il y a encore des parcelles à occuper. S'il n'y a plus de nouvelles entrées, ils doivent faire de nouvelles installations parce qu'ils sont saturés. Cela va toujours être payé par moins de gens. Parmi toutes les questions qui n’ont pas été abordées, il y a celle de l'héritage. Le jour où, dans la nouvelle convention, dans le plan HP, on dit qu'il y a l'interdiction de nouvelles entrées, les logements ne vaudront plus rien.

 

C'est un problème choquant pour les habitants. C'est un grave problème pour tout le monde. C’est aussi un problème pour ceux qui ont investi 20 000 euros dans un petit chalet ou 10 000 euros dans une caravane, autant que ceux qui ont investi 200 000 euros dans un logement. C'est grave pour tout le monde que l'on dévalue subitement un bien. Si l’on ne peut plus le vendre, on ne peut plus en faire hériter.

 

Par ailleurs, il y a des problèmes urgents. En tant qu'agent de consultation, je suis présente depuis 2007. En 2008, il y a eu la fermeture de Binche Plage, en 2010, de La Cala et, en 2009, plan d'expropriation, projet pilote avec un arrêté ministériel qui existe encore aujourd'hui, qui n'a pas été annulé et dans lequel il est indiqué que tous les chalets sont déclarés insalubres. Il y a urgence.

 

Prenons le cas de propriétaires de campings qui meurent ou qui ne sont plus capables d'exploiter leurs campings. Nous sommes alors devant des cas très concrets qui peuvent arriver dans un mois ou deux. Que fait-on, alors ? Les propriétaires ne peuvent pas vendre le camping dans l'état actuel des choses. Je parle ici d'un camping de caravanes qui est parfaitement en ordre au niveau de son infrastructure, mais dont le permis de camping est refusé parce qu'il y a des habitants permanents. Il y a un plus pour l'infrastructure. Si l’on dit qu'il n'y a plus de nouvelles entrées pour le propriétaire de camping, pour la phase 1, que veut-on obtenir ?

 

On dit « plus de nouvelles entrées », mais on s'en prend au fonds de commerce des propriétaires. Il y aura de moins en moins de gens. Ces gens paient l'infrastructure de leur poche et avec l'argent qu'ils gagnent de la location. Quel est le sens de cette mesure ? C'est quand même une question importante.

 

Mme Moucheron (cdH). - Je vous remercie pour vos questions et votre témoignage.

 

La parole est à Mme Daniel.

 

Mme Daniel, Cellule méthodologie et évaluation (DiCS) - Je reviens sur la question concernant la réflexion qui est demandée aux communes par rapport à leurs équipements phase 1 qui est inscrite dans la convention 2014-2019.

 

Comme vous le savez, quand le plan a été actualisé, le Gouvernement wallon a remis clairement l'accent sur la distinction phase 1 et phase 2, en choisissant d'accorder une priorité, en tout cas d'attention, aux équipements phase 1. Dans la convention de partenariat, ce qui est demandé aux communes pour 2014 – il y en a beaucoup qui sont en retard – dans la définition de leurs orientations, c'est de définir des orientations globales, générales et de se dire par exemple : « J'ai un camping, touristique ou une autre appellation, sur ma commune et ma vision pour ce camping, à l'avenir, est celle-là. Est-ce que je veux lui conserver une finalité touristique ou, au contraire, est-ce que j'estime que, pour telle ou telle raison, ce camping n'a plus d'avenir sous l'angle touristique et donc je veux lui donner une autre affectation ? ». C'est cette attente-là qui est demandée aux communes.

 

Maintenant, il faut savoir que certaines communes sont avancées. En tout cas, elles ont pris des orientations par rapport à certains de leurs équipements. Pour d'autres, c'est plus complexe de décider de manière adéquate quelle est la bonne option à préconiser pour tel ou tel équipement. Ce n'est pas toujours évident pour les communes. Certaines sont des petites communes avec peu de moyens, peu de personnel. C'est une difficulté que nous avons relayée au ministre Di Antonio, en demandant comment il pouvait formaliser un soutien méthodologique pour aider les communes à mener à bien leur réflexion. Voilà un peu où en est.

 

Parallèlement, je sais que le ministre Collin a demandé aussi un soutien au CGT qui est chargé de vérifier tous les équipements inscrits en phase 1 et de définir sous l'angle « tourisme pur » tel équipement, en vertu de la situation géographique qui est la sienne, s'il garde ou non un potentiel, s'il présente un intérêt pour le secteur du tourisme. Ce travail que le CGT doit réaliser devrait aussi aider la réflexion qui doit être menée par les communes.

 

Mme Moucheron (cdH). - La parole est à Mme Jansen.

 

Mme Jansen, Directrice de la Direction interdépartementale de la Cohésion sociale. (DiCS) - Juste un petit complément d'information. J'ai entendu que l'on parlait d'aménagement du territoire et d'environnement dans le cadre d'Inter-Environnement comme voie d'entrée du plan HP. Pour nous, ce n'est pas celle-là. La voie d'entrée du plan HP, c'est vraiment l'accès aux droits fondamentaux pour tous et nous avons ciblé les personnes précarisées.

 

Le plan, au départ, a été conçu pour aider les gens à vivre mieux et sur une base volontaire. Il ne faut jamais l'oublier non plus. S'il y a des fermetures comme à la Cala ou comme à Binche, ce n'est pas du chef du plan HP, mais du chef du gérant ou du propriétaire, soit qui est mis en faillite, soit qui décide de fermer contraint par la justice, peu importe. Cependant, ce n'est pas dans la philosophie du plan HP de faire fermer les équipements, c'est la première chose.

 

La deuxième chose, c'est que la philosophie pour la phase 1 est d'aider progressivement au relogement des personnes et pas de reconvertir les équipements qui appartiennent à un seul propriétaire ou qui sont gérés par un seul gérant, soit parce que c'est un camping reconnu qui a donc une vocation touristique et qui n'est pas vraiment compatible avec l'habitat permanent, soit on a à faire à une exploitation parfois des gens. Là aussi, c'est une lutte que l'on mène contre l'exploitation des plus pauvres.

 

Au contraire, la phase 2 envisage des reconversions. Ce qui nous a déforcés dans le plan, ce sont plusieurs facteurs. Il y a une question de moyens financiers. Nous avons des moyens globaux pour le plan, mais il y a tout le coût du logement qui est énorme et qui ne permet donc pas de répondre à la demande, ni de répondre de manière peut-être suffisamment diversifiée aux demandes.

 

Il y a aussi le problème que, dans le cadre du plan, il fallait réfléchir à des critères de reconversion et on a eu beaucoup de mal à mener cette réflexion à bien. Elle a presque abouti sous la législature précédente, elle est reprise maintenant par les deux ministres qui sont concernés. C'est aussi la faiblesse et les constats que l'on fait aujourd'hui, c'est parce que l'on a développé l'aspect social, on a essayé de créer du logement différent et innovant, des expériences-pilotes, mais il y a quand même l'aspect reconversion dont parlait M. Dodrimont qui est à creuser aussi, avec tous les problèmes financiers que cela va poser, parce que c'est énorme. Comme disait Mme Mahy, il y a un accroissement de la pauvreté, ce qui fait que, là aussi, il y a une pression plus forte sur un habitat moins cher.

 

Mme Moucheron (cdH). - La parole est à M. Haquin.

 

M. Haquin, Bourgmestre de Wasseiges. - Joseph Haquin, Bourgmestre de la petite commune de Wasseiges, 2 880 habitants. Ce n'est donc pas grand du tout.

 

Notre problème est que nous avons une parcelle appelée « le Clos du Lac ». C'est une zone de loisirs où tous les habitants sont là en copropriété. Il y a un gérant et une bonne centaine de résidents. Au début, il s’agissait de secondes résidences, mais depuis un certain temps, je vois qu'il n'y en a plus nulle part. N'ont-ils plus les moyens ? Je ne sais pas. Les gens arrivent et veulent s'y domicilier, c'est la première chose qu'ils demandent. Depuis le temps, les routes sont dégradées, nous avons régulièrement des fuites d'eau – une par mois – et il n'y a pas d'éclairage public.

 

Avec l'aide de la Région, nous avons pu engager une personne qui fait le relais avec les habitants, qui jette un œil concernant la salubrité, les domiciliations, les logements de ceux qui l'acceptent parce qu'il n'y en a pas beaucoup qui acceptent d'être logés autre part, car c'est leur mode de vie.

 

À l'heure actuelle, la commune est sur le point de reprendre tous les communs, c'est-à-dire les routes et toutes les parties qui sont communes. Il y a une station d'épuration, et cetera. Cela va nous coûter de l'argent. On le fait quand même de bon cœur, mais on voudrait avoir des garanties, le jour où l'on aura investi là-dedans.

 

Premièrement, il nous faut l'aide de la Région, sinon nous ne sommes pas capables d'investir pour le tout, mais quand on aura mis de l'argent là-dedans, on aimerait ne plus devoir dire aux gens, quand ils viennent pour se domicilier « Non, on ne peut pas vous domicilier, on veut bien vous accepter en attendant, mais vous devez aller voir ailleurs pour avoir un domicile. ». Une fois que l'on investit beaucoup d'argent, il faudrait pouvoir, à un certain moment dire « Oui, vous pouvez être domiciliés. ». Il me semble que c'est la moindre des choses.

 

M. Dodrimont (MR). - Pourriez-vous décrire la situation dans laquelle les gens vivent ? Ces demeures sont-elles convenables ?

 

M. Haquin, Bourgmestre de Wasseiges. - La grosse majorité vit bien. Ils ont un beau chalet bien entretenu, ce n'est pas dû n'importe quoi. Il y a plusieurs parcelles, le long de l'eau où il y a des caravanes et, là, c'est un peu autre chose. Sinon, il y a toute une partie où ce sont des gens normaux.

 

Mme Moucheron (cdH). - Merci pour votre témoignage.

 

La parole est à Mme Mahy.

 

Mme Mahy, Secrétaire générale du Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté. - Je voulais juste ajouter un élément et appuyer certains autres par rapport à l'ensemble de ce qui vient d'être dit.

 

Après les interventions, quand vous rappeliez la triangulation aménagement du territoire, logement et social, c'est bien sûr ces angles-là qu'il faut travailler et d'autres l'ont appuyé. Cela me paraît important, la partie logement et aménagement du territoire étant essentielle. Il faut voir le social sous l'angle, à la fois du potentiel des gens – certains l'ont dit, les gens inventent, remplacent le pouvoir public, ont de l'énergie, et cetera, et sont debout en train de faire – et il ne faut pas le voir que sous l'angle que ce sont des gens qui ont besoin d'une assistance sociale spécifique. Des assistances sociales spécifiques, il en existe pour tout le monde. Il n'y a pas de raison de faire une particularité des habitants qui sont là. Il est important de le voir sous l'angle logement et aménagement du territoire.

 

Une chose que je voudrais dire qui renforce la notion d'urgence par une porte d'entrée complémentaire et un peu différente de ce que Mme Tips a dit : « Depuis le temps où il y a un problème d'errance du plan HP – je ne parle pas d'errance des gens, qui ont été éventuellement poussés dehors et qui n'ont jamais trouvé à se rééquilibrer – il y a des mois et des années qui passent. ». Il y a donc l'opportunité d'agir, pour l'administration de l'aménagement du territoire, pour toutes les logiques d'héritage aussi. Il faudrait se poser la question de savoir si, dans le temps où toute cette réflexion a lieu, il n'y a pas lieu d'inviter à ce qu'il y ait, si pas des moratoires – le mot est peut-être trop fort – en tout cas des attitudes posées et concertées entre les cabinets et les administrations pour ne plus continuer à développer l'armada à la hussarde dans certains cas. On pourrait en parler en Province de Luxembourg en termes d'aménagement du territoire.

 

Il ne faut pas oublier que, au-delà des réglementations, il y a aussi le zèle que certains opérateurs se permettent de développer. J'ai vu, par exemple, un parc résidentiel, sur la Commune de Durbuy où, étant appelé pour un conflit entre deux personnes, l'aménagement du territoire ne s'est pas contenté de regarder la situation entre les deux personnes, elle a inspecté la situation dans les 100 parcelles et en a verbalisé 99. À partir de ce moment-là, ce parc résidentiel est devenu un problème. Il ne l'était pas, précédemment. Il l'est devenu à travers le prisme de l'ensemble de la réglementation qui s'est appliquée. À partir de ce moment-là, on est arrivé à un endroit où les plus forts du parc résidentiel peuvent s'en tirer, parce qu'ils sont mis devant des contraintes de mise en conformité qu'ils peuvent assumer. Parmi les plus faibles, les plus faibles des plus forts pourront peut-être s'en tirer, mais les plus faibles ne sont déjà plus là, sont déjà à moitié chassés ou déjà en errance quelque part.

 

Il y aussi l'obligation, dans toute démarche, par rapport à un processus comme celui-là, s'il est revu, de se dire que solutionner pour tous, c'est solutionner pour tous, y compris pour les plus faibles des plus faibles. Il faut donc pouvoir les entendre sur ce qu'ils ont créé, mais les entendre aussi sur la nécessité qu'ils ont à exister quelque part, peut-être à l'endroit où ils sont, peut-être en devant leur apporter un soutien spécifique particulier, mais en tout cas que l'associatif soit reconnu pour être compétent, d'être en dialogue constructif avec eux à partir de leur force.

 

Je rejoindrai, là, en tout cas dans la notion d'urgence, ce que Mme Tips a dit. Attention, ne laissons plus passer des mois et des mois. Je le dis, puisque l'on a dit que c'était sans tabou. Je me l'autorise, donc. Pour avoir été en tension sur ce territoire-là, notamment sur ce dossier, mais pas seulement – je peux parler, parce que j'étais sur le terrain et je n'étais pas la seule à être en tension à partir du point de vue que j'avais – c'est qu'il semblerait que, dans ce pays, personne n'ait rien à dire aux agents de l'aménagement du territoire. À l'époque où cette tension existait, y compris le ministre nous a dit, à un moment donné, qu'il ne pouvait pas aller contre tout ce qui avait été mis en route par le fonctionnaire délégué. Peu importe les personnes qu'il y a là derrière, il y a un problème à ce niveau-là.

 

Je le dis fermement. Sur la région où j'habite, des problèmes ont été créés là où ils n'existaient pas et des problèmes continuent à exister pour une partie des gens qui ont été atteints par les conséquences de ces difficultés. Attention à l'errance que l'on provoque ! Je parle bien des gens, des gens qui ont dû, dans des conditions extrêmement compliquées, quitter de force, pour des raisons comme celles-là, et qui ne se rééquilibrent jamais. Pour appuyer ce que M. Lardinois disait, même s'il y a eu de très belles choses faites sur la Commune de Somme-Leuze, je connais encore des ménages qui, depuis qu'ils ont dû quitter, dans ces conditions, sont encore aujourd'hui des errants, des années après. Ce sont des gens qui étaient propriétaires de quelque chose qui, depuis, ne se sont plus jamais réimplantés quelque part, avec une certaine sécurité, parce qu'ils ne l'ont plus retrouvée. C'est compliqué.

 

N'oublions jamais que celui qui doit bouger et déménager, quand il a les moyens, tout le monde sait que cela produit des dépressions ou des grossesses. Cela a un effet important sur les gens. Quand on est poussé à déménager quand on dispose de très peu de ressources, vous imaginez ce que cela produit. Je n'ai pas dit que cela ne produisait que des grossesses, mais cela produit, au contraire, souvent de l'errance, de la dépression et de l'appauvrissement accru.

 

Le dernier élément que je voulais soulever est que l'on a eu l'occasion, notamment dans le cadre du Conseil supérieur du logement, et moi particulièrement sur le terrain, dans la zone de Marche, j'ai eu l'occasion, à de nombreuses reprises, de rencontrer et de dialoguer avec des juges de paix. Vous pouvez rencontrer des juges de paix sur le terrain qui vous disent le désarroi complet qu'ils ont quand ils sont mis en devoir d'expulser d'un camping, d'une caravane ou d'un parc résidentiel. Ceux qui sont sensibles et honnêtes vous disent : « Aujourd'hui matin, j'ai une pile comme cela. Dedans, j'ai eu des expulsions de ce type-là, je n'en dors pas bien, parce que je me demande où peuvent aller ces gens après, ce qu'il se passe, pour eux, après. ».

 

Il faut prendre la mesure des conséquences sur l'ensemble de la longueur. Il y a même d'acteurs, comme ceux-là, qui trouvent qu'il est très important de trouver des solutions et, je pense à l'arrondissement où je suis, des gens qui, sur le plan judiciaire, ont changé leur regard et ne se disent pas que ce n'est pas l'endroit où être parce qu'ils connaissent les dispositifs.

 

Le dernier petit élément que je voudrais énoncer, que l'on a déjà dit et répété au niveau du Réseau wallon, c'est que je trouve personnellement dommageable que l'on utilise la question de la domiciliation pour essayer d'empêcher des gens d'accéder ou de rester dans l'habitat permanent. N'oublions pas que la domiciliation est une réglementation administrative qui ne sert qu'à faire que des gens ne perdent pas des droits en étant identifiés comme existant quelque part, puisque l'on peut aujourd'hui même bénéficier du risque de rue, et cetera.

 

La confusion que cela amène régulièrement sur le terrain fait que des acteurs, des communes disent à des gens, de toute bonne foi ou pas : « Non, tu n'auras pas ton domicile en allant là ». Rappelons-nous la législation sur la domiciliation : elle est là pour protéger les gens en termes de droit administratif et de droits sociaux. Il est extrêmement important de le rappeler et de pouvoir faire un distinguo entre les deux. On peut être domicilié ici, éventuellement – cela ne risque pas d'arriver – il suffit d'avoir un matelas, un accès à l'eau, un WC et pouvoir se réchauffer quelque chose et dire : « C'est là que je suis ». On n'est pas loin de cela.

 

Il est aussi très important de ne pas favoriser ce qui fait confusion entre les législations, au risque d'appauvrir et au risque de désoutiller des gens pour bien faire les choses.

 

Mme Moucheron (cdH). - Merci, Madame Mahy, pour l'ensemble de vos réflexions. Le débat est très riche et passionnant, mais je vais me permettre de donner la parole à ceux qui ne l'ont pas encore prise aujourd'hui.

 

La parole est à M. Rahier.

 

M. Rahier, membre du Réseau Brabançon pour le Droit au Logement. - J'habite à Froidchapelle dans un parc résidentiel et je suis membre du RBDL où je suis arrivé par hasard, mais l'habitat léger est une notion qui m'a accroché, donc je suis resté.

 

Je vais plutôt parler de plan HP et d'habitat léger. Les deux se mélangent d'office pour moi, vu la forme et les logements. Le plan HP, dans la Commune de Froidchapelle, est dans une impasse. On est arrivé à un modus vivendi qui tourne plus ou moins. Le parc est tout à fait convenable. Les gens qui y sont ont, pour 90 %, un permis de bâtir, et cetera, pour tout ce qu'ils ont fait. On ne transforme pas les caravanes, par exemple, en ajoutant quatre murs autour. Cela s'est fait ailleurs et a affaibli certaines personnes quand l'aménagement du territoire est descendu. Ici, tout est fait avec permis de bâtir. Nous sommes en zone de loisirs et nous pourrions être expulsés un jour, chose que nous ne comprenons pas très bien, puisque l'on a des permis de bâtir, un parc qui tourne tout seul, qui est en bonne santé financière, qui bénéficie de la réduction pour les taxes sur les eaux usées, parce que nous avons une station d'épuration totalement en ordre.

 

Je veux bien croire que ce soit une description un peu idyllique, mais c'est le cas du Bosquet et on ne comprend pas bien pourquoi nous ne pourrions pas être reconnus, puisque nous avons de l'électricité, le téléphone, l'eau, et cetera. Nous avons eu beaucoup d'espoir, en 2009, quand est sorti le fameux RESAter.

 

En effet, le parc correspondait à tous ces points. Nous ne voyions donc pas pourquoi cela n'aurait pas pu marcher. Les habitants, dans les parcs, demandent souvent à ce que l'on tourne vers la zone mixte plutôt que vers la zone d'habitat, car il y a des prescriptions urbanistiques, si l'on reste en zone de loisir, qui empêchent la spéculation, notamment le fait que l'on ne peut pas dépasser 60 mètres carrés au sol dans des petites parcelles, généralement, sauf quelques exceptions comme au Roly ou des autres parcs dans la région de Philippeville.

 

Les parcelles sont petites : le bâtiment fait 60 mètres carrés maximum. T Palm et autres, pour ne pas les citer, ne sont pas intéressés par ce genre de choses. On se protège donc de la spéculation – pas vraiment totalement, mais quand même un peu – en pouvant travailler de cette manière-là. Les habitants ont beaucoup espéré, en 2009, et voient les choses se détricoter ; ce qu'ils ne comprennent pas très bien, surtout qu'en fait, ils ont construit dans les règles, ils ont acheté dans les règles, ils ont des actes notariés, des permis de bâtir et ainsi de suite et, après, on vient leur dire que l'on pourrait les mettre dehors. Pourquoi ? C'est ce qu'ils demandent. Quand on voit le Bosquet, mais c'est un cas particulier, il y en a d'autres et chaque parc doit être revu de façon à essayer d'écrire une ligne générale qui aura ses exceptions. La seule chose, c'est que le Bosquet, on peut presque le qualifier de building à plat où nous avons une copropriété. L'entrée, c'est la commune, les routes, ce sont nos ascenseurs. Cela fait 40 ans qu'on les entretient et on n'a jamais rien demandé à personne. Le parc est totalement en ordre. Où sont les reconnaissances qui nous ont été promises tant dans le CWATUPE que dans cette annexe au CWATUPE qui était le RESA ter qui disparait. Pourquoi ?

 

Peut-être que, maintenant, serait-il bon d'attendre et de mettre un moratoire en attendant que le CoDT sorte, puisqu'il risque d'y avoir, au niveau de l'aménagement du territoire, si j'ai bien compris, un changement au niveau des zones d'enjeu communal ou régional qui deviendraient tout à fait différent de ce qui se faisait avant. Il serait peut-être bon de mettre un moratoire jusque-là. C'est un avis personnel.

 

Mme Moucheron (cdH). - Je vous remercie pour votre témoignage et vos réflexions. Quelqu'un d'autre souhaite-t-il intervenir, prendre la parole ?

 

La parole est à M. Praile.

 

M. Praile, ASBL Solidarité nouvelle. - Je voulais insister sur plusieurs choses qui ont déjà été dites. J'avais noté la question du moratoire, mais je pense que c'est vraiment un enjeu essentiel. J'ai un peu l'impression de revivre l'histoire, car on a déjà été en position de devoir demander un moratoire par le passé. C'était avant l'adoption du plan HP. Je voudrais vraiment insister sur ce qui a été dit. Il y a une propension et il va y avoir, très clairement, des effets d'accélération conscients, induits ou pas, qui risquent de précipiter des situations concrètes. Je ne vais pas être long sur cet aspect, car je l'ai déjà dit, mais cela me semble essentiel. Le problème, c'est qu'une fois que la machine est enclenchée, on sait que c'est extrêmement compliqué et on bute aux limites.

 

Par exemple, Mme Mahy a cité le pouvoir très étendu des fonctionnaires délégués, mais on pourrait l'aborder sous un autre angle pour des situations que l'on a déjà vécues où, une fois que la machine judiciaire est en route, la séparation des pouvoirs fait que l'on n'a plus rien à dire. D'accord, mais ce sont quand même des règlementations en place ou le flou qui permettent cela. Je dirais aussi qu'il n'est pas impossible que certains soient tentés de balayer les miettes sous le tapis tant qu'il en est encore temps. Je pense qu'il faut donc être vigilant sur cette question et pouvoir se donner les moyens pour que les situations les plus difficiles ou que les personnes qui vivent les choses les plus précaires soient encore là, à la fin de cette mission parlementaire, pour pouvoir aussi évaluer leur situation.

 

Vous avez dit à plusieurs reprises : « Il ne faut pas de solution monolithique. ». Ce sont des situations diversifiées. On a plaidé pendant longtemps pour cela, mais je pense qu'il faut être attentif, aussi, à ne pas morceler les réponses que l'on va apporter, à ne pas diviser et à ne pas discriminer. Le plan HP part d'une discrimination fondamentale entre les habitants des zones phase 1 et des zones phase 2. C'est un choix qui a été fait à l'époque, mais puisque l'on en est à l'évaluer, peut-être que cela vaudrait la peine de réévaluer cette dimension-là aussi. En effet, cela veut dire que, d'emblée, les gens qui vivent les situations les moins confortables, on imagine qu'ils ne resteront pas là où ils sont. Je sais que l'habitat en zone inondable pose plein de questions, mais elles ne sont pas neuves.

 

En tout cas, comme Mme Mahy l'a dit, il est vraiment important de réfléchir à des solutions pour tous, sans préjuger, car il serait vite fait aussi de dire : « d'accord, on peut discuter, mais camping, quand même... ». On sait bien que, psychologiquement, cela coince et cela pose plein de questions, mais il n'empêche que cela vaut la peine de rechercher aussi des solutions avec toutes les personnes concernées.

 

Je voulais également insister sur le fait – et M. Rahier l'a dit implicitement – que le plan HP, lorsqu'il est sorti, comportait une promesse que l'habitat allait être reconnu, peut-être, un jour. Ce n'était pas une promesse ferme, mais c'était une promesse et il faut bien reconnaître que, si j'étais à la place de l'habitant, j'aurais beaucoup de mal à avoir encore un peu de confiance dans ce que l'on m'a promis. Je ne veux pas jeter l'opprobre – ce n'est pas la question – mais il faut être conscient de cette dimension-là et, en particulier, sur la complexité et la lourdeur de tous les processus d'élaboration aux critères de reconnaissance. On en a connu quelques-uns quand même.

 

Vous avez cité le RESA ter, mais il y a eu pas mal d'autres choses qui sont l'objet de transactions complexes où il faut essayer que tout le monde s'y retrouvent, je pense plus en termes de compétence, et cetera, mais cela fait du temps long pour les habitants et, à nouveau, existe le risque aussi que l'on dise demain que c'est le côté qui est ensoleillé de la rue qui sera reconnue et pas l'autre, pour prendre une image. C'est important. Mme Tips évoquait tout à l'heure le projet de réaménagement du site de Pincemaille. On était quand même dans une situation assez compliquée et qui, à terme, faisait que les habitants actuels n'habitaient plus sur le site, mais aussi avec l'idée de reconnaître une moitié, mais pas l'autre. Tout cela est quand même très difficile à entendre pour les habitants. Je n'ai pas dit que c'était simple, mais je pense qu'il faut continuer à être extrêmement vigilant.

 

Deux points encore sur le caractère volontaire que l'on a rappelé.

 

On a rappelé aussi le fait que, quand la pression se fait extrêmement forte, qu'a-t-on encore comme capacité de choisir entrer rester ou partir.

 

Il est bien que l'on rappelle que ce n'est pas l'objectif ni la philosophie du plan, que les habitants doivent quitter, mais cela s'est déjà produit et cela risque de se reproduire encore. Soyons donc vigilants dans l'application. Il ne suffit pas d'en faire la déclaration, de ce caractère volontaire que nous avions exigé à l'époque. Il n'était pas présent dans le plan HP dans sa première version. J'ai la prétention de croire que l'on a été de ceux qui ont réussi à ce que ce soit intégré dans le plan ; ce qui n'était pas nécessairement le cas au point de départ.

 

Dernièrement, en ce qui concerne les enjeux de spéculation, mais même plus globalement, au-delà de la spéculation, M. le Bourgmestre l'a rappelé pour la commune de Wasseiges aussi, c'est toute la question de l'évolution de la population, demain, si c'est transformé. C'est une question qui a été peu investiguée, mais qui devient un peu urgente, aussi. Demain, on s'achemine vers une solution, mais il faudra prévoir des mécanismes. M. Rahier en a cité un. Je voulais simplement rappeler l'expérience menée en Flandre qui intégrait cette dimension-là.

 

La Flandre n'est sans doute pas exemplaire sur la gestion de l'habitat en zone de loisirs, mais il y a cette expérience, en Brabant flamand, qui est particulièrement intéressante où la vocation sociale de petites habitations modestes est intégrée dans le projet, de sorte que cela coupe court à toute perspective de spéculation. Cela tient compte de la modularité et on part de là – on l'a dit, mais je me permets d'insister – où les gens sont. Si c'est une caravane, c'est une caravane, ce n'est pas nécessairement aller tout de suite vers la maison en dur. Je ferme cette parenthèse.

 

Une autre perspective aussi, on l'a dit, est la reprise des voiries par les communes, mais je voulais aussi avancer un modèle qui vaut ce qu'il vaut, ce n'est pas la panacée, mais il y a aussi des perspectives de gestion collective du sol. Je pense en particulier à la dynamique des community land trusts. Cela mérite un autre débat, mais comme gestion tripartite par les habitants, les pouvoirs publics ou leurs représentants et les riverains, gestion collective du foncier avec des mécanismes antispéculatifs, c'est une piste. Je ne dis pas que cela va résoudre le problème, mais cela mériterait d'être investigué.

 

Mme Moucheron (cdH). - Je vous remercie, Monsieur Praile.

 

Par rapport à l'aspect monolithique, vous ne voudriez pas que cela soit morcelé. Je pense que ce n'est pas l'idée. Ce que l'on veut, c'est de la souplesse, avec quelque chose de finalisé qui puisse s'adapter à la réalité, parce que l'on sait que le HP ou l'habitat léger a une tendance à évoluer. On a beaucoup parlé des containers, récemment. Il faut que le texte abouti puisse s'adapter et répondre à des solutions qui évoluent constamment. Loin de nous – je m'engage peut-être pour tout le monde – l'idée de morceler, de faire des catégories et de mettre certaines personnes dans une zone acceptable socialement parlant ou politiquement parlant. Ce n'est pas du tout l'intention, ici.

 

Je vais céder la parole à M. Dodrimont qui voulait réagir à votre intervention.

 

M. Dodrimont (MR). - J'ai été attentif à ce qui vient d'être dit et beaucoup de choses sont intéressantes. Vous avez commencé tout à l'heure votre propos en disant : « Le plan Habitat permanent n'a pas réellement apporté de solutions. ». Il est vrai que l'on parle du sujet depuis 20 ans et que l'on a le sentiment que l'on est face à un document un peu à bout de souffle. C'était un peu votre propos.

 

Je partage le point de vue et j'ai eu l'occasion de le dire d'entrée de jeu. Je crois que ce dont le plan souffre le plus, c'est de l'absence, à mon sens, d'une prise de position claire par rapport à certains lieux de vie. J'ai toujours été partisan non pas d'une vision simpliste ou de trancher dans le vif, parce qu'il faut bien décider, mais au moins être partisan de plus de clarté. Cela me semble être ce qu'il conviendrait de mettre en avant, aujourd'hui.

 

Je regrette, mais même si dans le plan Habitat permanent, les départs se font sur base volontaire, même si on doit respecter les situations de vie des uns et des autres, convenons qu'il y a des lieux où il m'est personnellement insupportable de voir vivre des gens. Je m'en excuse beaucoup, mais je ne peux pas, en tant que responsable public, mais même aussi en tant qu'être humain, me dire qu'il est bien de voir des gens vivre dans des campings où il y a des problèmes d'humidité, de santé publique, de sécurité et des problèmes de regard, à l'égard d'enfants qui vivent avec leurs parents dans des caravanes. Je vous passe les problèmes de promiscuité entre les gens qui vivent dans une même caravane, et cetera.

 

Bref, à mon sens, il est indécent, en tant que responsable public, de pouvoir se dire que l'on doit trouver des formules pour pérenniser la vie dans ces lieux tels que je viens de les décrire. C'est mon point de vue, depuis le début, sur le plan Habitat permanent. Par contre, j'ai bu du petit lait et il m'arrive de temps en temps, dans cette grande maison, parce que j'ai beaucoup de frustrations en étant dans l'opposition depuis autant de temps, et j'ai vraiment apprécié votre discours par rapport à la situation dans les parcs résidentiels. Que demandent ces gens ? Pas grand-chose. Que demandez-vous, puisque vous êtes confronté personnellement à la situation ? Pas grand-chose. Qu'on légifère, cela ne coûte pas encore trop d'argent. Que l'on modifie quelques articles d'un code, cela ne coûte pas encore trop d'argent non plus. Et on va apporter tellement de sécurité juridique à ces personnes qui ont toujours une épée de Damoclès au-dessus de la tête en se demandant : « Que va devenir mon bien, demain ? Puis-je le céder ? ». J'entends cette situation comme étant vraiment la situation pour laquelle il y aurait peut-être une possibilité d'une réaction rapide des pouvoirs publics, de la Région wallonne et des solutions seraient trouvées.

 

Dans cette salle, je me suis souvent coltiné au ministre en charge de l'Aménagement du territoire lors de la précédente législature où il n'y avait aucune ouverture possible sur la modification, sur le plan planologique, des zones concernées par les parcs résidentiels de vacances, alors que l'on apportait – comme vous l'avez très bien fait tout à l'heure – une série de garanties, les permis délivrés, les infrastructures suffisantes, les conditions de vie acceptables et, malgré cela, pas à 100 %, mais en grande majorité, il n'y a pas eu d'ouverture pour que, sur le plan planologique, on puisse trouver des solutions pour sécuriser la situation des personnes.

 

Je reviens de façon très concrète pour mélanger ma réaction par rapport aux deux interventions en me disant : « N'a-t-on pas intérêt, à un moment donné, à prendre ses responsabilités ? ». Vous plaidez, pour la plupart ici, pour que l'on considère, sur le plan social, la situation de chacun. C'est évidemment mon objectif en tant que mandataire public, car on ne peut pas dire autre chose que ce que vous avez dit. Cependant, croyez bien que si l'on veut avancer concrètement dans cette problématique, il faudra quand même faire des choix et pouvoir se dire que tout le monde peut être confirmé dans sa situation de vie, que ce soit dans un camping déglingué avec des exploitants de misère qui les gèrent, parce que c'est cela aussi que l'on vit. On ne l'a pas beaucoup dit jusqu'à présent, mais je vois des gens qui paient un emplacement pour une caravane pourrie 150 euros par mois.

 

On a beau dire qu'ils se logent quand même finalement pas trop cher : 150 euros rien que pour le terrain avec une vieille caravane qui leur appartient, qu'ils ont mise sur le terrain, avec des frais de chauffage abominables, parce qu'il faut se chauffer avec le Zibro Kamin ou le petit chauffage électrique, à certains égards, je ne peux pas dire que l'on va pouvoir pérenniser ce genre de situations. Je poserais la question de la problématique du plan Habitat permanent sous l'angle du choix ou des choix à opérer, à un moment donné. Néanmoins, en plaidant comme vous le faites, de façon remarquable et avec votre engagement de terrain que je connais, que je souligne souvent et je trouve que votre action est extrêmement louable, si on ne fait pas des choix à un moment donné de se dire : « Voici, à terme, les situations que l'on va pouvoir continuer à accepter et d'autres qui ne sont plus acceptables », si on ne pose pas ces choix-là, je pense que le plan Habitat permanent aura les mêmes résultats que ceux que l'on constate aujourd'hui, après 13 années d'existence. On va dire que le plan Habitat permanent a de nouvelles limites, on les aura repoussées un peu, mais on n'aura pas trouvé de solution réelle.

 

Je pense, encore une fois, que toute situation doit être analysée sous un angle différent, mais qu'à un moment donné, s'il n'y a pas des choix qui sont posés avec des zones qui sont déclarées inaptes à l'habitat, il faudra arrêter de faire le jeu de ces exploitants de la misère et arrêter de mettre des gens dans des situations inacceptables sur le plan sécuritaire ou social.

 

Par contre, il y a une série de nouvelles situations qui pourraient être créées via l'habitat léger et qui répondraient aux attentes des personnes, parce que les personnes y sont par choix, comme on l'a évoqué tout à l'heure, mais aussi par nécessité parce qu'il n'y a rien d'autre, parce que le logement social est ce qu'il est aujourd'hui ou le logement en général.

 

Ayons quand même, à un moment donné, à cœur de dire : « les zones de camping, parfois inondables, faut-il continuer à fermer les yeux et faire en sorte que les gens y restent parce que c'est sur base volontaire qu'ils doivent ou pas quitter les lieux où ils vivent ? ». J'ai vraiment ce sentiment que, en tant que responsables publics, on ne peut pas tolérer les situations qui existent, qui mettent en danger les personnes qui font appel, parfois, à des services de secours quand il y a des moments d'inondation. Je suis déjà allé avec mes pompiers chercher une vieille dame que l'on a dû charger dans une chaise sur un canot pneumatique pour l'amener sur la rive parce que son chalet était entouré des eaux. Est-ce cela que l'on doit cautionner via le plan Habitat permanent ? Je ne le pense pas, tout en étant, pourtant – certains le savent ici – très attentif à la situation sociale des personnes.

 

Si on ne pose pas des choix que l'on peut écrire ensemble – c'est le but, si on n'avait pas aujourd'hui suscité cette réunion, c'est que l'on aurait les idées toutes préconçues – en disant : « Il n'y a qu'à, il faut faire cela, c'est ceci, c'est blanc, ce n'est pas noir, et cetera ». Ce n'est pas cela le but. Je crois qu'il faut engager chacun ici à se dire qu'il faudra poser des choix si on veut réellement une amélioration de la situation des personnes concernées par l'habitat permanent.

 

Mme Moucheron (cdH). - La parole est à Mme Mourin.

 

Mme Mourin, Centre d'Action Laïque - Je suis Barbara Mourin et je travaille pour une des sept régionales du Centre d'action laïque. Je suis ici en raison, non pas d'un travail que l'on mène dans le cadre précis du plan HP, mais d'un travail que l'on mène depuis plus de 10 ans maintenant, auprès d'habitants issus de la communauté des gens du voyage qui habitent sur un terrain – que l'on appelle terrain familial – dans la région de Mons.

 

Je constate beaucoup de points communs sur la manière dont sont appréhendées les questions qui concernent les citoyens qui résident dans les territoires dits plan HP et les habitants ou citoyens de la communauté des gens du voyage, principalement souvent sur le déni de citoyenneté dont sont victimes ces personnes. Des décisions sont prises, elles en sont l'objet et pas les sujets, comme le disait Mme Mahy.

 

J'ai demandé la parole maintenant pour réagir directement à votre intervention. J'ai le sentiment – cela fait à peu près 10 ans que l'on travaille sur ces questions – que, souvent, les raisons qui sont invoquées pour justifier des décisions qui sont prises concernant ces citoyens, sont qu'il y a une instrumentalisation d'arguments liés à la sécurité – que ce soit la sécurité sanitaire des gens, la sécurité liée au territoire – pour, quelque part, faire disparaître un mode d'habitat qui a beaucoup de difficultés à être reconnu.

 

Ce dont je voulais peut-être témoigner très brièvement, c'est ce travail que l'on mène maintenant depuis longtemps qui a abouti à un échec très difficile pour les associations qui se sont mobilisées, mais avant tout pour les habitants. Les personnes qui vivent depuis presque 20 ans sur ce terrain sont sous le coup d'une décision d'expulsion, même si celle-ci est gelée par une procédure en justice. Les pressions successives ont fait que, pour certains d'entre eux, ils ont accepté un relogement, avec toutes les conséquences que cela entraîne sur leur santé, notamment, sur la dynamique familiale, sur toutes les questions de transmission intergénérationnelle et de détricotage d'une culture qui est vraiment au cœur du développement de ces personnes. C'est un constat d'échec et, pour les personnes qui, sous le coup de ces pressions successives, ont accepté une solution de relogement, il n'y a pas de solution de relogement. Cela en rajoute encore une couche sur l'insécurité dans laquelle vivent ces personnes.

 

M. Dodrimont (MR). - Merci beaucoup pour votre intervention.

 

Peut-être pour replacer encore, avec quelques exemples, mon intervention de tout à l'heure, dites-vous bien aussi – et je vais me placer sous l'angle très local de la question – que, dans une commune comme la mienne qui est fortement impactée par les problématiques HP parce que j'ai des parcs résidentiels de vacances en zone inondable et en zone non inondable, il y avait 17 campings sur ma commune, il n'y en a plus autant aujourd'hui et beaucoup ont d'ailleurs été victimes de l'habitat permanent. Cela a causé la désaffection de l'activité touristique et ces campings ont fermé par manque de rentabilité et la problématique de l'habitat permanent y est liée.

 

J'ai aussi des gens du voyage sédentarisés qui occupent des zones agricoles sans permis, sans aucune situation et qui sont extrêmement nombreux. J'ai aussi des RUE en zone touristique qui sont devenues des lieux d'habitat permanent sans qu'il y ait, là, des exploitants de campings ou autres. Ce sont parfois des propriétés même communales où les gens sont venus s'installer sans avoir aucun lien avec une copropriété ou une exploitation privée pour administrer leur bien et s'occuper de leurs conditions de vie.

 

Une commune fortement impactée comme la mienne se doit d'investir. Je vous ai expliqué qu'on l'avait fait à travers deux projets modestes, mais qui ont le mérite d'exister : 14 logements spécifiques pour l'habitat permanent et la reprise de voiries dans un parc résidentiel. Il y a encore du boulot. Si on ne permet pas à cette commune – c'est à mon avis le cas de beaucoup d'autres – de pouvoir obtenir des « compensations » sur le plan de sa gestion globale, à savoir le retour à l'activité touristique dans les campings... On ne l'a pas dit jusque maintenant et je regrette un petit peu que le CGT ne soit pas représenté aujourd'hui. Ils ont été invités et j'aurais aimé que leur point de vue puisse être aussi développé. On a déjà eu l'occasion, lors d'une réunion organisée par la DiCS récemment, d'entendre les représentants du CGT, mais c'est leur rôle, puisque c'est le Commissariat général au Tourisme, donc ce n'est pas la DiCS, ce ne sont pas des représentants d'une action à caractère social, ils sont là pour défendre l'activité touristique. Ils sont preneurs de ce que les lieux de campings, pour ne pas les citer spécifiquement, redeviennent des lieux d'exploitation économique.

 

Les communes sont demanderesses aussi. C'est le cas de ma commune. Autant je vais plaider pour dire que les parcs résidentiels qui n'ont plus que le nom de parc résidentiel de vacances, qui sont devenus des lieux de vie permanents deviennent de vrais lieux de vie permanents, si je puis me permettre d'employer ces termes, de manière telle à ce que l'on sécurise juridiquement les personnes, que l'on puisse leur permettre d'améliorer la sécurité, leurs conditions de vie, et cetera, comme on l'a dit à maintes reprises. Autant c'est mon plaidoyer premier, autant je souhaite accompagner ce plaidoyer d'une volonté de retour à l'activité touristique et économique des autres endroits où la vie ne peut pas, à mon sens, s'y développer de façon pérenne, sécurisée ou encore durable pour les personnes qui y sont confrontées.

 

Je sais que c'est tranchant par rapport au discours de certains, je sais qu'il y a des tas de bonnes raisons de pouvoir dire : « Non, il faut accompagner les personnes qui vivent en camping, malgré tout ». Je crois que, à terme, il faut, pour ces personnes, trouver d'autres solutions que leurs conditions de vie d'aujourd'hui. Une des raisons que j'évoque ici n'est pas essentielle, c'est aussi l'activité économique. Je ne l'avais pas fait tout à l'heure, je parlais de la sécurité des gens et j'entends encore le dire, je parlais de briser cette exploitation de la misère et je le redis aussi, mais il y a aussi de façon très claire le pourquoi un pouvoir, qu'il soit local ou régional, fonctionne : c'est quand même pour pouvoir créer de l'activité de manière telle à assumer tous les pans d'un budget pour ses différentes institutions.

 

Fatalement, comme dans toutes les entités, il y a des contraintes budgétaires. Il y a des recettes et des dépenses. Si on veut pouvoir consacrer des dépenses à l'accompagnement de problèmes sociaux, et notamment ceux que connaissent les personnes qui vivent dans les conditions d'habitat permanent, il faut aussi des recettes et, parmi celles-ci, les communes en ont perdu énormément de par la mutation de l'activité touristique dans ces lieux qui, en devenant des lieux de vie, soit partiellement, soit totalement, ont perdu cette force économique qu'ils représentaient.

 

C'est même devenu, a contrario, des lieux où les interventions sociales se multiplient, ce qui génère... Encore une fois, sans reproche pour les personnes qui vivent cette situation, c'est par nécessité qu'ils s'y trouvent. Si on n'a plus que ce type de situation à gérer, il sera impossible de dégager les moyens pour pouvoir faire du travail concret.

 

À un moment donné – j'en reviens à mon intervention de tout à l'heure – il faut faire des choix et ces choix passent, à mon sens, par une clarification des situations et pouvoir déterminer, sur les centaines de points HP qu'il y a en Wallonie, ce que l'on veut faire de ces points, à terme. Il n'est pas dit que l'on doit faire cela en deux mois ou même en deux ans, mais à terme, il faudra que l'on définisse, pour chaque lieu, les lignes directrices de l'avenir de ces lieux. C'est un point de vue que je défends depuis que je suis au Parlement. Cela fait quelques années, maintenant.

 

J'ai vraiment la crainte que l'on n'aille pas dans cette vision concrète pour l'avenir de la problématique HP. Ce serait, à mon sens, une occasion manquée. Il faut aller dans cette direction, mais c'est mon expression personnelle.

 

Mme Moucheron (cdH). - La parole est à Mme Mahy.

 

Mme Mahy, Secrétaire générale du Réseau wallon de lutte contre la pauvreté. - Je vais faire une réflexion globale à partir de ce que vous venez de dire, Monsieur Dodrimont, puis de ce que d'autres ont dit.

 

Vous dites qu'il est important, pour arriver à aboutir à quelque chose, de faire et de poser des choix et d'avoir des orientations claires et qu'il y a peut-être des endroits et/ou des conditions de vie dans lesquels sont des familles qui ne sont pas acceptables, dans le sens du respect des gens, dans le sens du danger.

 

A priori, je ne peux pas m'opposer du tout à ce que vous dites si, dans la construction de la réflexion qu'il y a pour revoir le plan Habitat permanent, on prend en considération, dans la manière de construire ces choix, le fait qu'il y a au moins deux portes d'entrée, il y en a peut-être d'autres : parler de lieux et de sites, puis parler de familles et de conditions d'existence. Personne ici, dans l'assemblée, ne sera favorable à ce que des gens restent dans des conditions d'habitat dégradées, dangereuses, dans l'extrême pauvreté, dans des conditions de vie familiale, dans une promiscuité telle que cela devient difficile parce que l'on n'a pas les moyens de pouvoir passer à autre chose, et cetera, dans des habitudes de vie où l'on a intégré la pauvreté et l'appauvrissement comme les conditions de vie, donc on ne sait même plus qu'il y a autre chose comme perspective. Personne ne sera favorable à cela.

 

Par contre, penser que régler cette question sera uniquement en faisant des choix de site, je pense que ce serait réalimenter une partie de l'erreur du plan actuel. Il faudrait se dire qu'il y a peut-être certains endroits à l'intérieur desquels il y a des conditions d'existence qui demandent à considérer que les gens ont probablement fait le mieux qu'ils pouvaient et font le mieux qu'ils peuvent, à partir des possibles qu'ils ont – financier, matériel, d'existence, de relations, et cetera – et construire à partir de là la piste de solutions qui sera pensable avec eux. Cela ne veut pas nécessairement dire que l'on reconnaît une zone en danger parce qu'elle est, par exemple, en aléa d'inondation très grave ou que l'on vit dans un chalet où, à tout moment, on se demande s'il ne va pas s'écrouler sur la tête des gens. On est d'accord, ce n'est pas cela que l'on veut, mais il faut prendre en considération, dans un plan comme celui-ci, le mieux possible que les gens font.

 

Dans ce « mieux possible », il y a donc des conditions culturelles d'existence pour pouvoir les conduire vers autre chose, qui devra peut-être rester une caravane, mais dans un état de confort et de salubrité, dans un environnement sécurisé par rapport à un endroit si jamais cet endroit est véritablement insécurisant, qui peut-être sera un habitat léger ou un chalet amélioré, c'est important. Il ne faudrait pas faire une dichotomie entre population et site. Il y a des sites à aborder, avec des caractères qui peuvent être multiples – certains sont insécurisants par certains aspects alors que d'autres parties du site, c'est l'inverse – mais le mélange en partant des populations. C'est en cela, même s'il y a des défauts, que je réinsiste – pas suite à l'expérience néerlandophone, il ne faut pas croire qu'elle est parfaite – qu'il y a une prise en considération dans l'expérience néerlandophone que, dès qu'ils s'intéressent à une zone ou dès qu'ils l'ont fait, ils regardent le potentiel individuel des gens dans leurs capacités financières, de mobilité sociale, et cetera. Cela ne veut pas dire qu'ils disent : « Vous êtes dans une caravane qui est en train de s'écrouler ou un chalet, donc on va vous laisser dedans », mais ils peuvent travailler des années avec des personnes à déplacer ou avoir un processus.

 

Il ne faudrait pas opposer, parce que l'on risquerait de retomber dans un discours dichotomique qui, à mon sens, est un des préjudices dans la manière dont le plan est souvent communiqué aujourd'hui : tout blanc, tout noir, comme s'il y avait une solution toute faite qui doit aller vite.

 

Je suis d'accord avec vous aussi : il ne faut pas opposer l'activité économique à la réalité des modes d'habiter dans des endroits. Vous avez raison, il faut de l'activité économique et, forcément, là où il y a de l'habitant permanent, ce sont aussi souvent des zones où il y a du tourisme, sinon les gens n'auraient pas trouvé à cet endroit-là, et il y a forcément coexistence dans cette tension entre potentiels économiques.

 

Ce qui serait peut-être intéressant, mais j'espère que ce n'est pas au détriment d'une vision progressiste du plan, ce serait d'avoir l'analyse du CGT, de savoir quels sont tous les campings ainsi que les parcs résidentiels, et cetera, privés et publics – je ne sais pas s'ils ont une vision sur tout – qui ont été fermés à un moment donné, entre autres par la porte d'entrée du plan Habitat permanent, mais pas seulement.

 

Au moment où j'étais sur le terrain, j'ai travaillé sur une commune où, aujourd'hui, on en est à trois : un parc résidentiel et deux campings fermés. Un des parcs résidentiels a été fermé, il est toujours en état de jachère, aujourd'hui. Cela fait plusieurs années. Les gens étaient propriétaires, ils ont tout perdu. Ils sont relogés dans du privé, certains dans des conditions dramatiques, d'autres plus ou moins bien. Il y a deux campings qui ont fermé. L'activité économique est en train de se reconstruire, tant mieux, on verra bien. Il serait intéressant de savoir, quand il y a des fermetures, s'il y a véritablement des reconversions économiques. Il faut aussi avoir une vision qui n'est pas non plus dichotomique : il va de soi que, parce que l'on est camping, on vide et on réaffecte à du tourisme. J'ai vu, dans ma région, que l'on revendait à du privé pur et simple, privé qui ne fait pas ce type d'exploitation au service de la collectivité.

 

J'ai l'impression qu'il faut absolument s'obliger, dans le travail qui va être fait, à n'être ni dans le tout blanc, ni dans le tout noir. Je pense que ces activités n'ont pas à être opposées.

 

Dernier élément que je voudrais mettre sur la table et qui repose sur le logement en tant que tel, c'est la condition de la caravane qui, dans notre Code wallon du logement, n'est toujours pas reconnue comme habitat. On sait qu'il y a des pays limitrophes où elle est reconnue depuis longtemps, on sait que la Flandre la reconnait. Au-delà de cela, ce n'est pas parce que la Flandre la reconnaît. Je dis que, dans cette expérience-là, elle laisse des gens des petites caravanes « cracra », en tout cas dans les projets que l'on connait. Je ne fais pas de généralité.

 

Cela pose aussi un problème très important. Le fait qu'elles ne soient pas dans le Code wallon du logement n'entraîne pas nécessairement que l'on est dans la pauvreté parce que l'on vit en caravane, que l'on ne sait pas gérer ou que l'on est dans la promiscuité. On peut très bien vivre dans une caravane, il y a des gens qui le prouvent.

 

Pour ne pas mélanger les deux sujets, parce que l'on sait qu'ils ont leurs caractéristiques, même s'il y a des points communs, cela permettrait de dépasser une série d'autres problématiques. Il y a une connexion d'intérêts à réfléchir à cela. Il serait peut-être dramatique d'arriver à une étape où l'on pourrait se dire que, tout à coup, des containers pourraient apparaître et, eux, être reconnus comme potentiellement une bonne solution, quand on n'aurait jamais fait le pas de la caravane, dans de bonnes conditions, qui soit reconnue. On serait dans une « ambiguïté bizarre », de quelque chose qui bousculerait des modes de vie culturelle importants.

 

Je voulais vraiment amener l'idée de dire qu'il me semble que l'on a tout à gagner à ne pas être dans du blanc ou noir, mais du développement territorial, partant de ces populations et de toutes ces populations. Cela ne veut pas dire laisser dans la pauvreté. J'y tiens. Comme réseau wallon de la lutte contre la pauvreté, je ne voudrais pas que l'on retienne du réseau wallon contre la pauvreté, que l'on dise : « On est pour reconnaître n'importe quelle zone, dans n'importe quelle condition ». Ce n'est pas du tout cela. On est là pour que les conditions de vie des gens s'améliorent, mais dans les modes culturels, dans les possibles et les processus qui sont les leurs. Le basculement dans de l'habitat dur – on l'a dit tout à l'heure, mais je le rappelle – pour une partie des gens, cela les appauvrit drastiquement et, pour une partie des gens, ils n'ont plus aucun potentiel financier pour autre chose que juste le nécessaire. Ce n'est pas nécessairement la bonne route.

 

Mme Moucheron (cdH). - Merci, Madame Mahy. Je pense qu'il y avait encore deux interventions.

 

À moi aussi de jouer le maître du temps, tout doucement vers midi. Je vois deux interventions. Peut-être si l'un d'entre vous voudrait reprendre la parole pour une conclusion, c'est peut-être le moment d'y penser.

 

La parole est à M. Toussaint.

 

M. Toussaint, MOC Brabant wallon. - Faisons dans la nuance. Ne soyons pas dichotomiques. Je pense que c'est effectivement essentiel.

 

Je suis en tout point d'accord avec ce que Mme Mahy a dit. Au niveau du MOC, il n'y a pas l'ombre d'un papier de cigarette entre les deux positions, si on peut encore utiliser cette expression devenue politiquement incorrecte.

 

Ce qui parait essentiel, ici – c'est vraiment une question importante et je pense que cela nous caractérise pour l'ensemble ou la plupart – c'est que l'on travaille au départ des personnes qui ont une logique ascendante. On ne fait donc pas une politique contre les gens, mais avec eux et, parfois, la politique est contre. C'est un peu ce que Mme Mahy dit par rapport au fait de dire qu'évidemment, personne ici n'est pour le développement de la pauvreté, mais par contre, il est pour le respect des personnes et de leur dignité, c'est-à-dire de ne pas les rendre incapables par rapport à leur situation, mais justement le contraire.

 

C'est donc la situation d'acteur qui est essentiel et le regard culturel est essentiel, car on peut voir un habitat et se dire que ce n'est pas terrible, avoir des jugements de valeur. Par contre, il y a des notions objectivement insalubres, de promiscuité qui sont des freins, mais il est vrai que quand on parle, par exemple, d'habitat assez réduit, les gens s'organisent, ont des lits pliables, et cetera. Ils vivent autrement, vivent plus à l'extérieur. Tout cela, il faut le regarder aussi. Je voulais dire aussi que les gens ne sont pas des problèmes. Ce sont des opportunités. Quand on pense, au niveau des campings, d'activités économiques et en même temps résidentiel, on pourrait aussi se dire que des gens qui sont là en permanence, vont contribuer à sécuriser plutôt qu'insécuriser. Il faut vraiment comprendre la dynamique dans laquelle cela se fait. C'est essentiel. Chacun a une valeur non seulement économique, mais également une valeur en soi.

 

Pour terminer, simplement, M. Dodrimont a dit : « On va les écrire ensemble ». J'aurais tendance à lui dire : « Chiche ». Puisque l'on va les écrire ensemble, cela veut dire « faisons-le vraiment ensemble », mais ne nous limitons pas à une position d'avis, aujourd'hui. Entamons alors un processus, je ne dirais pas permanent, car cela rend fou, mais à terme et, d'autre part, prévoyons alors une série de rendez-vous, une structuration réelle, que cette proposition ne soit pas la proposition d'un ministère, en l'occurrence. S'il part de là, c'est très bien. Les affaires sociales se préoccupent du social, mais qu'elles soient le mix de trois ministères majeurs – affaires sociales, aménagement du territoire et logement – puisque l'on est bien conscient que c'est une dynamique qui est à l'intersection de ces trois lieux.

 

J'aurais tendance à dire « oui, écrivons-les ensemble, je suis partant. ».

 

Mme Moucheron (cdH). - La parole est à M. Praile.

 

M. Praile, ASBL Solidarité nouvelle. - Je voudrais d'abord juste lever quelques malentendus, sans répéter ce qui a déjà été dit. Il est évident que je n'ai jamais fait de promotion d'habitat en zone de loisir et en caravane, en particulier.

 

Je ne vais pas répéter tout ce que Mme Mahy a dit, mais j'y souscris tout à fait. On est bien d'accord pour dénoncer des situations les plus critiques et pouvoir aider – on l'a toujours dit – à reloger ceux qui demandent à être relogés. On voit que cela, c'est déjà compliqué pour leur garantir un relogement vraiment stable.

 

Je me permets quand même d'insister sur la question de fond qu'il y avait là derrière. Vous avez dit que vous travailliez sans tabou. Je vous invite à aller jusqu'au bout de ce sans tabou et à pouvoir examiner toutes les situations d'entrée de jeu et puis, à un moment donné, oui, il y aura des choix. La question est de savoir comment ils vont être faits et sur quelle base. Pour le dire explicitement, on sait que la caravane est un objet un peu fantasmatique. Cela nous titille sur nos représentations liées à l'habitat. Ce n'est pas comme cela que l'on devrait habiter, et cetera, et pourtant, si. Il y a des gens qui vivent depuis très longtemps. Il y a des gens pour qui cela correspond à un mode de vie et il y a des gens pour lesquels c'est totalement toléré. Pour les forains, personne ne s'inquiète qu'ils vivent dans des caravanes. On ne cautionne donc pas toutes les situations.

 

Je pense aussi que, dans les situations d'exploitation, parfois, on est aussi dans de la dichotomie, dans du caricatural. Tous les gérants ne défendent pas, mais ils ne sont pas tous dangereux, des négriers, des exploitants de la misère. Je pense que, là aussi, il y a parfois de la nuance à apporter.

 

Pour revenir sur l'exemple de la caravane, lors de mes dernières vacances en camping, je voyais les bungalows qui se louaient tout équipés. En même temps, c'est un modèle d'ingéniosité. Je trouve que la caravane, d'un point architectural – je m'étonne que l'on n'ait pas plus creusé la question –, car fonctionnellement, c'est quand même super intéressant comme approche de l'habitat. Je pense qu'il faut continuer à réfléchir dans ce sens-là.

 

Autre précision, je n'ai certainement pas voulu dire que le plan HP n'avait servi à rien et qu'il avait tout empêché. Je ne voudrais pas qu'il y ait de malentendu à cet égard. Simplement, l'impasse dans laquelle nous sommes maintenant, c'est d'abord constaté par les habitants sur l'amélioration possible de leurs conditions de vie, mais aussi par les bourgmestres qui, souvent, sont volontaires pour essayer d'améliorer les choses, mais où l'on manque d'outils. On est un peu coincé au milieu du gai entre des réglementations.

 

Je voulais insister sur deux choses pour terminer. Tout d'abord, notamment par rapport à cette question de caravane, depuis quelques années d'observations de ces enjeux, l'insécurité juridique dont on a parlé à plusieurs reprises fait que les personnes, les habitants, ne disposent pas, aujourd'hui, de protection. On pourrait faire le parallèle avec d'autres réglementations qui peuvent aussi être instrumentalisées et qui sont sensées les protéger. Je pense notamment à la question de l'insalubrité qui est sensée les protéger, mais qui peut aboutir à des effets pervers, contre-productifs, où les gens sont sommés de déménager parce que leur logement n'est pas conforme, mais ils se retrouvent sans logement, dans certaines situations. Là dessus, le fait d'accorder des droits, c'est quand même le meilleur moyen que l'on ait trouvé pour lutter contre des formes d'arbitraires. Comment va-t-on appliquer la réglementation ? Va-t-elle être instrumentalisée ? Je pense que c'est aussi une piste qu'il faut continuer à creuser pour que les personnes elles-mêmes disposent de droits. Là, on évite le cautionnement d'exploitation par tel gérant ou telle personne de la misère. Si c'est la personne elle-même qui dispose en propre d'un droit individuel. Il y a alors tout le débat sur le droit imposable au logement, partant du principe que c'est la personne elle-même qui dispose du droit et non l'habitation. C'est une limite des réglementations actuelles.

 

Pour conclure, en ce qui me concerne, je ne résiste pas à vous citer – cela fera plaisir à M. Dodrimont, car cela vient de près de chez lui – les conclusions de M. Stassen qui était, à l'époque, sociologue de l'Université de Liège. Cela date de 1999. C'était un colloque qui était organisé à Aywaille sur le thème du logement en marge au logement alternatif. Il disait ceci – et je trouve qu'il a pointé très justement les enjeux – « Il s'agit, aujourd'hui, de tirer les conséquences du système qui nous mené où nous sommes. Soit, on accepte de rendre possible le logement alternatif, ouvert à ceux qui disposent de moins de ressources, soit on permet à tous de bénéficier du confort décrété comme minimal.

 

On connait les impossibilités rédhibitoires de la mise en pratique de cette deuxième branche alternative qui permet d'accéder à tous au confort décrété comme minimal, il importe donc de tenter de réaliser la première, sans perdre de vue le travail à faire pour rendre, un jour, l'utopie de la seconde possible.

 

Mme Moucheron (cdH). - Je vous remercie beaucoup, M. Praile.

 

Je pense que l'on a déjà brossé un large tableau. La parole est à M. Wattier.

 

M. Wattier, Réseau brabançon pour le droit au logement (RBDL). - Rapidement, pour terminer, sur la notion d'habitat léger, avec le RBDL, nous réfléchissons à une approche qui traite de l'aménagement du territoire et nous pensons qu'il est important de réfléchir à des zones d'habitat léger qui incluraient la mixité dans le type de bâti traditionnel ou léger, dans le type d'usage permanent ou non permanent. Par ailleurs, nous pensons qu'il est important de réfléchir à la notion même de logement. On sait que l'article 23 de la Constitution parle de « décent », de logement décent. Il faut bien réfléchir à ce que ce logement décent ne devienne pas une arme pour les plus faibles, bien réfléchir à la notion d'habitat choisi, car cette notion est très délicate. Jusque quand est-on vraiment amené à choisir le type d'habitat que nous prendrons ?

 

Nous pensons, aussi, qu'il est important de travailler les questions de définition même de ce qu'est un logement, c'est-à-dire l'article premier, l'article 3 du Code du logement, ainsi que l'arrêté qui définit la salubrité qui, globalement, est tout à fait adaptée à la notion de logement, mais qui, sur un certain point technique – je ne vais pas entrer dans le détail – définit des métrages un peu trop élevés, des choses pareilles. On ne revient pas sur les questions de sécurité, bien sûr.

 

Je pense qu'il est important de réfléchir à cette évolution. Un petit détail : les premières domiciliations dans les domaines, c'est dans les années 70. Le quartier de La Baraque, à Louvain-la-Neuve, par exemple, qui est une zone de 2,8 hectares où habitent 136 personnes sur 63 unités de logement a commencé en 1975. Ces deux moyens de trouver une solution à la question du logement, qui n'est pas toujours un problème, me semblent importants à tenir en compte.

 

Mme Moucheron (cdH). - Je vous remercie beaucoup. Je me permets de dire quelques mots en conclusion.
Pour rebondir sur ce que M. Toussaint disait tout à l'heure et ce que j'avais dit, le principe, ici, est une première étape. C'est l'idée dans laquelle on a imaginé cette Table ronde comme une première rencontre avec l'ensemble du secteur. On est déjà fort sollicité depuis le début de la mission, les uns et les autres, par des particuliers, des groupements, des riverains, des communes, des situations particulières comme les community land trusts.

 

L'idée était de lancer plus officiellement notre statut de missionnaire – je l'ai entendu tout à l'heure – et d'entamer le débat avec vous. L'idée est de ne pas travailler en vase clos, de vous intégrer dans la réflexion et d'arriver à quelque chose, à un texte, en ce qui nous concerne, à un rapport à faire au Gouvernement, quelque chose qui soit le plus réaliste, efficace et au service de tous.

 

Je vous remercie pour votre participation.

 

M. Dermagne (PS). - Je me joins aux remerciements que Mme Moucheron vient de vous adresser. C'était une matinée riche de vos expériences, de votre savoir, de votre connaissance du terrain.

 

J'ai dit tout à l'heure que c'était sans tabou, c'est aussi avec beaucoup d'imagination. Je pense que, d'un point de vue juridique – je suis juriste de formation, de déformation, cela dépend comment on voit les choses – il y a toute une série de dispositifs que l'on doit pouvoir imaginer.

 

On sait qu'en Belgique, on a une vision un peu carrée des choses, notamment en termes de propriété. On dit que le Belge a une brique dans le ventre, mais il a aussi les pieds sur terre et veut absolument être propriétaire du foncier, du sol. On peut imaginer des situations qui soient différentes. L'emphytéose en est une, je sais que ce n'est pas quelque chose de courant dans le chef des privés, contrairement à d'autres pays, notamment l'Angleterre. Ici, ce sont souvent les pouvoirs publics qui prennent en emphytéose des biens, mais cela peut être une des pistes à aménager, à envisager.

 

Dans la suite de notre réflexion, on veut aussi associer des spécialistes, notamment des professeurs d'université, pour plancher sur la question et proposer des dispositifs qui ne sont pas forcément, aujourd'hui, des dispositifs qui font partie intégrante de notre corpus législatif. On a envie de travailler sans tabou, mais aussi d'être imaginatif, créatif.

 

Mme Moucheron l'a dit, c'est un rapport que l'on doit remettre au Gouvernement, mais qui sera aussi déposé et débattu au sein du Parlement wallon. Il doit comporter une série de constats, mais surtout des recommandations. On est content de vous avoir entendu, aujourd'hui. Vous avez dit : « Chiche », mais c'est tout simple, bien entendu ! Je pense que c'est clair, dans notre chef. C'est aussi pour cela que l'on a voulu tenir nos débats au sein du Parlement wallon, car c'est une enceinte législative, mais aussi participative. On auditionne beaucoup.

 

On voulait aussi que nos débats soient enregistrés pour avoir une trace écrite. On les fera retranscrire, on vous les soumettra pour aval et corrections éventuelles pour voir si vos propos n'ont pas été déformés. Ce sera la première base de notre travail et de notre relation qui sera peut-être épistolaire pour la suite. On échangera avec quelques rendez-vous à différents moments ou différentes étapes de notre travail pour vous soumettre, totalement, le fruit de nos réflexions, de nos travaux, de nos rencontres et redemander votre avis sur ce que l'on vous soumettra.

 

Encore merci à toutes et tous !

 

M. Dodrimont (MR). - Quand il y a trois présidents, il y a trois conclusions. On va essayer de ne pas être trop long. Je ne vais pas redire ce que mes collègues ont brillamment exprimé. Je suis très heureux d'avoir partagé ce moment avec vous.

 

En toute fin de propos, je voudrais revenir quelque peu sur la problématique du logement en tant que telle, parce que si on a parlé d'habitat permanent, on sait que l'on ne peut pas éviter de parler du problème de manque de logement dans notre Région et peut-être pourrions-nous ajouter de manque de logements adaptés à la situation que l'on connait.

 

J'ai évoqué tout à l'heure le projet Spirale. C'est un projet merveilleux, magnifique, sensationnel, je ne vais pas dire le contraire, mais qui a un tout petit défaut, c'est que le coût de chaque habitation, je n'oserais pas le dire ici, tellement il est prohibitif. Il y a une autre réflexion qu'il faut avoir par rapport à ce que l'on a évoqué : les zones d'habitat léger, je suis assez partisan d'une réflexion par rapport à cela. J'ai eu l'occasion d'interroger le Ministre Prévot et le Ministre Marcourt sur un projet mis en place par le Centre d'orientation et de formation d'Amay. Ils ont créé un concept de logements de 24 mètres carrés, on va l'appeler « container », si l'on est péjoratif, ou « pavillon », si l'on est quelque peu plus ambitieux. Il comprend tout ce qu'il faut pour vivre de façon correcte. J'en ai la description ici. Son coût est de 36 000 euros. On est là face à une possible solution pour créer du logement qui correspond à ce que les personnes souhaitent, des petites unités dans des endroits qui peuvent correspondre à leur choix de vie, mais aussi un coût qui est acceptable pour les personnes, pour les pouvoirs publics, en complément ou en substitution.

 

Là-dessus, je pense qu'il ne faut pas avoir peur de briser les tabous et se dire que l'on a toujours eu un concept de logement. Vous avez rappelé les principes du Code du logement, il peut y avoir autre chose.

 

Croyez bien que, dans mon propos, même si j'ai envie de parler de choix, de dire qu'il faut se déterminer, d'accord et je reprends mes propos et je me reprends moi-même : « c'est bien que tu dises cela, si je me parle en mon for intérieur, mais trouve aussi des solutions, en même temps. ». Il est clair que se dire que l'on ferme un camping du jour au lendemain parce qu'il y a des habitants permanents et qu'il n'y a qu'à trouver des solutions, non. Il faut travailler, en amont, avec ces solutions de logements alternatifs. Là aussi, le Code du logement, mais aussi les règles d'aménagement du territoire doivent s'adapter à ces situations.

 

Avant cela, je reviens toujours à ce principe de base de dire qu'un inventaire précis, on y travaille et j'ai été très attentif à ce que Mme Danielle a expliqué tout à l'heure avec des chiffres qui vont être validés bientôt. Tout le monde pourra donc en avoir connaissance, je présume. Pourquoi travaille-t-on ? On cite 10-12 000 personnes dans la situation. On en répertorie dans les communes adhérant au plan HP 8 500. Il y a donc encore une différence. Finalement, où le problème se situe-t-il ? Ce problème concerne-t-il 1 000, 2 000, 3 000, 4 000 ? Je pense que le problème ne concerne pas les 12 000 personnes que l'on évoque. Pour une bonne partie de ces personnes, il y a des solutions qui sont déjà, comme je l'ai dit tout à l'heure, peut-être plus faciles à trouver puisque l'on est uniquement face à une problématique légistique et pas nécessairement face à une problématique qui génère des gros moyens pour trouver des solutions. Là, il y a vraiment une réflexion que l'on doit continuer à partager et, cela, c'est quelque chose auquel nous serons très attentifs.

 

Nous voyons modestement comme programme, peut-être l'organisation d'une visite de site. Vu le calendrier parlementaire, on aurait envie de vous proposer cela encore ici au mois de juillet. Je sais que, pour certains, il sera peut-être difficile d'être présents puisque la période de congés commencera, mais dans les associations représentées ici, il y a plusieurs personnes qui en font partie et qui peuvent, à mon avis, remplacer l'une ou l'autre des personnes présentes aujourd'hui.

 

Si on veut vraiment avancer, si on veut être concrets pour la rentrée de septembre, avec déjà un peu de grain à moudre, il serait peut-être profitable que l'on organise une visite de terrain début juillet. On pourrait être là, peut-être, face à des situations aussi diversifiées que celles que l'on a évoquées, aujourd'hui. On pourrait aussi peut-être voir ce type de logement alternatif. Il pourrait être intéressant pour chacun d'entre nous de dire : « Il y a peut-être des solutions qui existent de ce côté-là » ou « Cela ne vaut rien et il faut penser à autre chose ».

 

On reviendra vers vous pour vous faire une proposition de visite. M. le Ministre a bien voulu nous mettre quelques moyens à disposition pour l'organisation de ces visites et on l'en remercie. On profite que les travaux soient enregistrés pour le dire. Avec ces petits deniers qu'il consacre à nos travaux, on aurait l'occasion de vous inviter à une visite de terrain qui pourrait peut-être se faire dans un autocar ou, en tous les cas, dans un véhicule qui nous permette d'être plus nombreux pour pouvoir continuer à partager en se déplaçant et puis aller, de façon concrète, vers certains sites à visiter. On va travailler sur cette proposition de visite.

 

J'espère que vous avez toutes et tous rempli un petit document avec vos coordonnées précises. S'il y a une adresse courriel, c'est évidemment l'idéal. On va faire en sorte que ceux qui n'ont pas encore pu s'inscrire sur ce document le fassent et, ainsi, on pourra revenir vers vous de façon efficace et rapide. On se reverrait pour ceux qui sont disponibles dans la première quinzaine de juillet pour une visite de terrain et, dès la rentrée de septembre, il y aurait la continuité de nos échanges comme on l'a fait aujourd'hui. Je pense que c'est une bonne façon de travailler. Là, on pourrait revenir peut-être avec des éléments un peu plus concrets.

 

J'avais envie de vous poser une question, mais vous y répondrez la prochaine fois. Si vous aviez une baguette magique, que modifieriez-vous du plan Habitat permanent, ce fameux plan dont on a longuement discuté, les 67 mesures, si on pouvait améliorer ce plan, qu'apporteraient comme contribution les intervenants d'aujourd'hui ? Réfléchissons-y déjà pour notre prochaine rencontre, de manière à ce que l'on puisse faire des propositions à M. le Ministre, faire des propositions à l'Assemblée parlementaire. On espère pouvoir encore une fois améliorer non pas le plan Habitat permanent, mais les personnes qui vivent dans des situations décrites par l'habitat permanent. C'est bien ce qui nous préoccupe au premier chef.

 

Merci encore une fois pour votre bonne participation. On a même respecté l'agenda. C'est merveilleux. Bon appétit à chacun, bon après-midi et on se revoit début juillet pour ceux qui sont disponibles.

 

Ceci clôt nos travaux de ce jour.

 

La réunion est levée.

 

 - La séance est levée à 12 heures 12 minutes.