Interview Harris Eisenstadt
(17 février 2016)
Nous avons l’honneur et le plaisir de vous présenter le batteur/compositeur Harris Eisenstadt, résident de New York. Harris Eisenstadt fait partie de nombreux projets musicaux et il est un musicien fort demandé. Comme ‘leader’ de son groupe Canada Day il joue et compose de la musique jazz moderne, aventureuse, cherchant constamment des nouvelles frontières musicales. Jusqu’à présent le groupe Canada Day a sorti cinq albums, tous très bien reçus dans le monde du jazz et tous des références absolues pour les musiciens et les amateurs du jazz moderne. Le 29 avril prochain, Eisenstadt sera présent avec Canada Day au Palais des Beaux Arts à Charleroi. Concert unique en Belgique. À ne pas manquer !
- Vous êtes né à Toronto, Canada. Y avez-vous vécu longtemps ? Comment êtes-vous devenu un musicien de jazz ?
HE : J’ai joué de la batterie de 10 à 16 ans, mais pas très assidûment. Dans un concert band, ensemble de jazz, groupes rock avec des amis... J’étais plus sérieux pour faire des sports que pour la musique. Alors, durant ma première année au Colby College à Waterville, Maine (États-Unis), mes priorités changèrent. J’ai arrêté les sports et je commençai passionnément à m’intéresser à la musique. De 20 à 23 je terminai le baccalauréat et je vécus une année à New York, pratiquant les huit heures par jour proverbiales, essayant désespérément de mener mes compétences techniques au niveau nécessaire. Pendant la première année à Colby College, âgé de 19 ans, je tombai amoureux de jazz... particulièrement Elvin Jones et Tony Williams.... et cela devint clair de ce que j’allais faire de ma vie.
- Pourquoi déménager à New York, puis en Californie et de nouveau à New York ?
HE : J’ai déménagé à New York parce que je m’y sentais à l’aise et parce que New York semblait être l’endroit où résidait des musiciens du plus haut niveau. Il y a des grands musiciens partout... mais à New York il y en a beaucoup. J’ai déménagé en Californie parce que j’avais réussi à obtenir une bourse d’études pour étudier avec Wadada Leo Smith au California Institute of the Arts entre 1999 et 2001, et j’y ai obtenu mon ‘Master of Fine Arts’. J’y suis resté parce que j’avais rencontré ma future femme, la bassoniste Sara Schoenbeck. Elle faisait déjà carrière à Los Angeles. Je fus diplômé en 2001 et je suis resté en Californie jusqu’en 2006. Alors je ne pouvais plus attendre et je décidai de retourner à New York.
- Parlez-nous de la scène musicale de New York. Parlez-nous de ‘The Stone’ et votre 40e anniversaire la semaine du 1 à 6 septembre de l’an dernier.
HE : Oui, certainement beaucoup de grands musiciens et beaucoup de possiblités. Aussi pour d’autres raisons : l’enseignement (2 jours par semaine) et des responsabilités familiales (nous avons un enfant de six ans), je ne suis pas beaucoup parti le soir... Au début que j’habitais à New York, je jouais dans plusieurs groupes et j’ai lancé de nombreux projets différents... J’ai rationalisé mes projets de leader et de sideman ces dernières années. La semaine au Stone était une occasion fantastique car cela m’a donné la possibilité de présenter un mélange de projets existants et nouveaux... un grand merci à John Zorn pour ça ! (1)
- Vous avez fondé Canada Day en 2007. Entre-temps cinq albums sont parus (dont un du Canada Day Octet), tous excellents. Pourquoi ce nom ‘Canada Day’ ? Nostalgie ? Quelles histoires racontez-vous par la musique de Canada Day ?
HE : Oui... nostalgie... et aussi par hasard : notre premier concert avec le groupe ‘officiel’, après avoir essayé des combinaisons de personnel différentes, eut lieu en Juillet 1, 2007, ... Canada Day ... fête du Canada. Quant aux histoires que nous racontons... s’il n’y a pas un récit littéral (comme en ‘program music’), j’espère qu’il y a un sens d’audace, d’aventure, de dialogue et de communication entre amis.... J’espère que ces ‘moyens’ narratifs sont tous évidents sur les enregistrements et encore plus manifestes quand on joue en live.
- Est-ce possible de vivre de votre musique ?
HE : Vivre et être inspiré, bien sûr ! Nourrir une femme et un enfant et payer les factures... pas tout à fait... pour moi
c’était toujours un mélange de concerts et de l’enseignement... et le pourcentage de l’un et l’autre change d’une année à l’autre...
- Une courte introduction de vos collègues musiciens de Canada Day ?
HE : Nate Wooley n’a besoin d’aucune introduction en Belgique ! Un musicien accompli... un des meilleurs artistes dans notre domaine de travail d’aujourd’hui... et un bon mec.
Matt Bauder... un autre bon mec... un merveilleux joueur de saxophone/clarinette... avec une large gamme d’amours artistiques et projets à travers de nombreuses styles... et un chéri.
Chris Dingman... l’un des rares grands vibraphonistes qui travaille dans notre rang de musique.... un brillant penseur harmonique/mélodique, coloriste rythmique... une âme sincère et généreuse.
Pascal Niggenkemper... un des plus beaux ‘nouveaux’ joueurs de basse de la scène de New York... avec son instrument il produit une
vaste gamme de possibilités sonores... un beau et aimable être humain... et récemment devenu père d’un beau petit garçon...
- Vous venez en Belgique au mois d’avril (29 avril-Charleroi, Palais des Beaux Arts). Avez-vous déjà joué en Belgique ?
HE : Oui, Canada Day jouait à Gand Jazz en 2014... une nuit superfun !
- La tournée en Europe doit être épuisante : la France (26/04), la Norvège (27/04), les Pays-Bas (28/04), la Belgique (29/04), le Portugal (30/04 & 01/05), l’Espagne (03/05) et l’Autriche (05/05). Comment voyagez-vous ?
HE : C’est épuisant... particulièrement une tournée comme ceci. Nous voyageons par avion, train et camionnette.
- Le public, est-il très différent dans les différents pays ?
HE : Absolument... en général en Europe il y a plus d’intérêt pour notre musique... et chaque pays/région/ville a son propre
caractère.
- A quoi peut-on s’attendre à Charleroi ?
HE : Un concert de musique toute nouvelle, qui sera enregistrée plus tard dans la tournée...
- Si vous deviez choisir –disons- cinq CDs/LPs de toute l’histoire de la musique, lesquels seraient vos favorites ?
HE : John Coltrane “A Love Supreme”
Eric Dolphy “Out To Lunch”
Conjunto Guaguanco Matancero “Guaguanco”
Stravinsky "Le Sacre du Printemps" (Bernstein, conductor)
Townes Van Zandt “Flying Shoes"
- Dernière question : un rêve ? Un souhait ?
HE : Que mon fils grandisse dans un monde pas si bouleversé comme le monde peut parfois l’ être...
Canada Day - de gauche à droite: Chris Dingman, Pascal Niggenkemper, Matt Bauder, Harris Eisenstadt, Nate Wooley.
Website : www.harriseisenstadt.com
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Les CDs de Canada Day
Canada Day
Clean Feed (2009)
Harris Eisenstadt (drums, compositions), Eivind Opsvik (bass), Chris Dingman (vibraphone), Nate Wooley (trumpet), Matt Bauder (tenor saxophone)
Canada Day II
Songlines (2011)
Harris Eisenstadt (drums, compositions), Eivind Opsvik (bass), Chris Dingman (vibraphone), Nate Wooley (trumpet), Matt Bauder (tenor saxophone)
Canada Day Octet
482 Music (2012)
Harris Eisenstadt (drums, compositions), Garth Stevenson (bass), Chris Dingman (vibraphone), Dan Peck (tuba), Ray Anderson (trombone), Nate Wooley (trumpet), Matt Bauder (tenor saxophone), Jason Mears (alto saxophone)
Canada Day III
Songlines (2012)
Harris Eisenstadt (drums, compositions), Garth Stevenson (bass), Chris Dingman (vibraphone), Nate Wooley (trumpet), Matt Bauder (tenor sax)
Canada Day IV
Songlines (2015)
Harris Eisenstadt (drums, compositions), Nate Wooley (trumpet), Matt Bauder, (tenor saxophone), Chris Dingman (vibraphone), Pascal Niggenkemper (bass)
(1) John Zorn est un des plus grands musiciens/compositeurs de notre temps. Il a sorti déjà plus que 250 CDs et fonda le label Tzadik. Un autre de ses projets fut le club "The Stone" à New York, où chaque semaine un musicien peut présenter au public ses divers projets musicaux, et cela pendant toute une semaine.
AvB - photos: copyright William Semeraro