Animaux de ville, animaux plus petits


Selon une équipe de chercheurs ­emmenée par Thomas Merckx, postdoctorant à l’Earth and Life Institute de l’Université catholique de Louvain (UCL), le fait de vivre en ville impacte la taille corporelle des animaux, qui deviennent plus petits. La raison ? «Le phénomène d’îlot de chaleur urbain qui, augmentant les coûts liés au métabolisme, favorise une taille plus petite» répond le team de recherche. Notant de suite que cette tendance s’inverse chez les papillons de jour et de nuit ainsi que chez les sauterelles, groupe dont la taille corporelle est favorablement liée à la mobilité. Constat qui montre que les communautés urbaines sont davantage modelées par le degré de fragmentation que par la température. Ainsi, en comparant le changement de taille selon des sites non-construits et très urbanisés, il ­apparaît que la taille corporelle des papillons et sauterelles augmente de 14% dans les sites densément construits, tandis qu’elle diminue de 16% chez les autres groupes animaux. 

 

Pour Hans Van Dyck, professeur à l’Earth and Life Institute de l’UCL et promoteur du travail, «On peut s’attendre à ce que la fragmentation des ressources écologiques en zone urbaine soit un filtre important de mobilité, de sorte que ce sont principalement les espèces les plus mobiles qui se maintiennent dans les communautés citadines». Dans une publication consacrée aux seuls papillons de nuit et éditée dans Global Change Biology, les chercheurs ont révélé qu’au sein des espèces les plus grandes, ce sont les individus les plus grands qui sont favorisés en milieu urbain et que ces changements de taille corporelle se produisent à la fois au niveau de la communauté et au niveau intra spécifique.

 

Compte tenu que c’est la taille corporelle qui détermine la dynamique des interactions écologiques, nous voyons ici que la perte de certaines espèces impacte fortement le fonctionnement des écosystèmes urbains. Pour Thomas Merckx, «il est démontré que l’urbanisation rapide de notre planète induit une perte de la biodiversité». D’où l’intérêt des résultats du travail actuel qui débouche sur de nouvelles voies d’études pour élucider la manière dont ­l’urbanisation conduit à ces changements de taille corporelle et ce que cela implique au niveau des écosystèmes. Bref, le genre d’étude dont les résultats sont essentiels si nous voulons concevoir demain des villes impactant ­toujours moins la biodiversité. Parmi les aménagements urbains d’ores et déjà envisagés, on note la création ou la modification des plans d’eau urbains et des infrastructures écologiques citadines pour augmenter la quantité et la qualité des habitats. La valeur de ce travail publié dans Nature réside dans la grande variété des groupes d’animaux étudiés, récoltés dans 81 sites du pays, soit au total un échantillon de 95.001 animaux appartenant à 702 espèces.  

https://www.uclouvain.be

Jean-Claude Quintart



Article paru dans Athena, le mag scientifique  n° 338 de Septembre-Octobre 2018. Article reproduit avec permission.